Il était ministre délégué à la Promotion de l’égalité des chances en 2005, et il y croyait. A 58 ans, Azouz Begag, père de deux filles, a retrouvé sa place de chercheur en sociologie urbaine au CNRS. Dix ans après les émeutes, il s’avoue en échec, quand il entend les propos de Nadine Morano, députée européenne, défendre la France comme un pays “de race blanche”.
Pour lui, peu de leçon ont été tirées des événements de Clichy-sous-Bois. C’était pourtant “la crise la plus spectaculaire de toute l’histoire des banlieues“. Et pour lui, fils d’immigrés algériens, ce fut un choc : “Quand l’état d’urgence a été décrété, je me suis senti écrabouillé par l’histoire qui me revenait en pleine gueule comme un boomerang.”
Aujourd’hui, Azouz Begag fait les comptes. Il évalue “à peu près à 15 millions” le nombre de personnes de culture musulmane en France. Pour un résultat qu’il déplore :
“Sur 36.000 mairies en France, peut-être cinq seulement sont dirigées par des édiles d’origine maghrébine. Sur 577 députés, combien d’enfants de Clichy-sous-Bois ? Est-ce normal ?“
Et pire selon lui, dix ans après ces émeutes qui ont consacré l’ethnicisation des questions sociales dans le débat public, c’est “cette parole raciste qui s’est décomplexée dans les médias“.
L’ancien ministre estime que “‘la boîte de Pandore’ a été ouverte en 2005 : c’est l’utilisation au plus haut niveau de l’Etat de la haine de l’Islam comme cheval de bataille politique.”