Au collège, 80 % des élèves punis sont des garçons. Et ce, que l’établissement soit rural ou urbain, public ou privé (avec un fort taux de réussite), classé en ZEP (zone d’éducation prioritaire) ou non.
Cette asymétrie sexuée, constante, dérangeante, vient d’être établie par Sylvie Ayral, docteur en sciences de l’éducation de l’université de Bordeaux, qui a épluché près de 5 900 sanctions infligées dans le département de la Gironde entre 2002 et 2008. Comment expliquer ces chiffres en contradiction avec le discours égalitaire officiel ?
Dans un livre explosif, La Fabrique des garçons, la chercheuse démontre l’effet pervers des punitions qui “consacrent les garçons dans une identité masculine stéréotypée et renforcent les comportements qu’elles prétendent corriger : le défi, la transgression, les conduites sexistes, homophobes et violentes”, explique-t-elle. Assimilée à une épreuve ou à un rite de passage, la sanction est en effet recherchée comme une médaille de bravoure par les garçons pour prouver leur virilité, se démarquer des filles, impressionner les autres, asseoir leur image de “rebelle” et devenir “populaire”. Censée faire réfléchir, elle est cruellement contreproductive et c’est ainsi que l’école mixte de la République serait devenue un cadre de violence et de pensée inégalitaire, d’autant plus que les garçons savent pertinemment qu’ils sont punis plus souvent et plus sévèrement que les filles. […]
“A écouter les enseignants, les garçons sont punis à cause des hormones, la fameuse testostérone. Or, ceux qui se comportent mal n’ont pas plus de testostérone que les autres !”, s’insurge Sylvie Ayral qui pointe le naturalisme (ou “essentialisme”) ambiant. […]