C’est le débat le plus inattendu qu’ait connu l’Espagne depuis longtemps. La maire de Madrid, l’ex-juge de 71 ans Manuela Carmena, soutenue par le parti de la gauche antiaustérité Podemos, a-t-elle commis un crime de « lèse-tradition » avec l’organisation de la Cabalgata de Reyes, la chevauchée des Rois mages qui, chaque 5 janvier, rassemble des milliers d’enfants dans le centre de Madrid ?
Sur les réseaux sociaux, la polémique a commencé doucement, ironique, sur les costumes de Gaspard, Melchior et Balthazar, comparés à des « rideaux de douche ». Des tuniques aux couleurs vives, ornées de motifs simples représentant l’eau, la terre et le feu, ont en effet remplacé les costumes fastueux inspirés des crèches napolitaines habituellement utilisés lors des défilés. […]
Dans un pays où la division entre gauche et droite repose encore, en partie, sur le marqueur idéologique de la laïcité, la tradition catholique des Rois mages s’est ainsi révélée un sujet brûlant. Certaines critiques ont ainsi souligné une « revanche anticléricale » de la part des descendants des républicains, qui ont toujours associé l’Eglise avec le franquisme.
La polémique avait démarré quelques semaines plus tôt. L’annonce par la maire de Madrid que des femmes allaient incarner des Rois mages dans deux défilés de quartier et que les traditionnels chameaux ne participeraient pas à la cabalgata au nom de la protection des animaux avait été perçue comme une provocation. […]