Tribune de Jean-Michel Lecomte est vice-président de la Ligue de l’enseignement sur la laïcité.
Voici le débat laïque relancé, et de la pire des façons qui soit, pourvu d’un mot étendard, l’islamophobie, et d’un enjeu, l’avenir du remarquable travail conduit par l’Observatoire de la laïcité sous la présidence de Jean-Louis Bianco. Le débat s’est noué autour des propos tenus par Elisabeth Badinter interrogée sur une radio publique et qui affirmait qu’il convenait de « défendre la laïcité sans avoir peur d’être traité d’islamophobe ». […]
Faut-il cependant considérer, au motif qu’un certain nombre de criminels assassinent ici par haine de la liberté d’expression, de la démocratie ou ailleurs réduisent des hommes et des femmes à une soumission totalitaire par mépris pour la dignité humaine, en se prévalant d’une lecture politique insupportablement rétrograde de l’islam dont ils font la justification de leurs crimes, que les musulmans dans leur ensemble devraient être tenus pour comptables de leurs dérives ?
Au-delà du fait qu’ils sont les principales victimes de ces dérives criminelles, le danger d’articuler le propos autour du concept d’islamophobie conduit à une essentialisation de l’islam et des musulmans comme la pratique, depuis des années, l’extrême droite qui, on l’aura noté, conserve un silence gourmand sur le débat qui vient d’être ouvert. […]
A tout le moins, peut-on faire l’économie du sentiment que la réponse résiderait dans la construction d’un ordre public réduit à la fonction d’assurer la sauvegarde d’une identité nationale refermée sur elle-même, exclusive de toute influence qui la viendrait pervertir, hostile à toute immigration ou à toute singularité cultuelle ou cultuelle qui ne ferait pas acte de capitulation devant son propre récit.