(…) Oui, la culture arabo-musulmane n’est pas au clair avec la femme. Issu du monde méditerranéen et de sa longue tradition patriarcale, le Maghreb (à l’exception de la Tunisie) subit de plus l’influence croissante du wahhabisme et du salafisme depuis 40 ans. Et cela porte un préjudice grave au statut de la femme, à son image et à sa représentation. Ce ne sont pas des fantasmes.
Rappelons-nous les paroles de Wassyla Tamzali, avocate algérienne, humaniste, féministe en lutte pour les droits des femmes et la laicité, lors de la sortie de son livre Une femme en colère : « Aujourd’hui nous sommes confrontés à un vaste chantier d’endoctrinement sur l’infériorité des femmes mené par des savants, par l’école, les télévisions par satellite, les cassettes audio, les prêches des mosquées, les milliers d’imams autodidactes, et des stars médiatiques ». « A travers l’éducation religieuse dans les écoles, on enfonce dans la tête des petits que la domination des femmes est voulue par Dieu. »³
Mais aussi : « Plus on refoule la sexualité, plus elle est présente », « Ce refoulement conduit à de véritables déviances pathologiques ».
Pour elle, « si les femmes et les filles, en se voilant, croient se mettre à l’abri du désir des hommes, c’est le contraire qui se produit. La dissimulation des corps féminins a pour effet, affirme-t-elle, d’augmenter les crimes et le harcèlement sexuels, d’exacerber la peur des femmes et la convoitise des hommes. »⁴
Kamel Daoud dit vrai : cette frustration, ce refoulement, ce fantasme du corps de la femme occidentale libérée, « donc facile », existe. Cela ne veut pas dire qu’il est à l’œuvre dans tous les esprits. Cela ne veut pas dire non plus qu’il est la quintessence de la culture arabo-musulmane ; ni que partout dans le monde musulman, de la république islamique iranienne jusqu’au Moyen-Orient, des centaines de milliers de femmes et d’hommes ne trouvent pas l’épanouissement dans leur vie sexuelle.