Le collectif “Décoloniser les arts” entend pointer du doigt l’entre-soi qui exclut d’emblée les artistes de la “diversité”. Il a dressé un état des lieux des discriminations subies par les créateurs «racisés» – terme choisi par le collectif pour désigner les personnes victimes de racisme
Depuis Exhibit B de Brett Bailey en novembre 2014, les polémiques autour de la présence – et de l’absence – des non-Blancs sur les scènes françaises se multiplient. C’est à l’occasion de l’une d’elles que s’est formé le collectif Décoloniser les arts. Après le 30 mars 2015 précisément, jour d’une réunion au théâtre de la Colline à Paris sur les ateliers « 1er Acte », destinés aux « jeunes issus de la diversité ». « Seuls des Blancs étaient présents ce jour-là pour présenter le projet. Sous le couvert d’une discrimination positive, comment ne pas y voir une forme de néocolonialisme ?» interroge la politologue et directrice du collectif Françoise Vergès. […]
30 % de la population française étant constituée d’immigrés (ou natifs d’un Dom) et de leurs descendants, d’après un rapport de l’Ined, on devrait retrouver cette proportion sur scène, dans les équipes des théâtres, au cinéma, dans les arts plastiques et dans l’ensemble des disciplines et lieux culturels français. Force est de constater que tel n’est pas le cas.
«D’un point de vue symbolique, les arts sont colonisés tout simplement parce qu’ils se sont forgés à travers une histoire coloniale et postcoloniale, qu’ils véhiculent parfois un imaginaire et des représentations teintées d’exotisme ou de stéréotypes raciaux», écrit le collectif dans son compte rendu de la réunion. […]
« Sans chiffres, nous risquons de rencontrer le même échec que le mouvement HF pour l’égalité hommes-femmes dans le spectacle vivant », craint Gerty Dambury. En l’absence d’objectifs chiffrés, les résultats encourageants des premières années de travail de HF ont en effet été en partie annulés par les changements de direction des CDN en 2013. Le collectif bute hélas sur un obstacle : l’interdiction des statistiques ethniques. Ses membres devraient toutefois être mis en relation par le ministère avec Patrick Simon, de l’Ined. « Sans passer par ce type d’étude, il doit être possible d’obtenir les chiffres dont nous avons besoin », affirme la dramaturge. Le collectif souhaite également promouvoir des récits reflétant la richesse de la société française, ses couleurs et ses cultures.
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