La prestigieuse université américaine Tufts a décerné le « Prix Joann Bendetson de la diplomatie publique » à Fouad Ben Ahmed. Connue pour former ambassadeurs et diplomates du monde entier, Tufts récompense chaque année les individus ou institutions qui s’engagent en faveur d’un modèle “d’intégration inclusif”.
Revendiquer une « identité mixte » est très anglo-saxon, relève John Bowen, anthropologue américain spécialiste de l’islam en France.
Le prix de Fouad Ben Ahmed n’est pas non plus sans rappeler le travail méticuleux qu’effectue l’ambassade américaine en banlieue depuis des années. Réputé pour aller là où l’Etat français ne va pas ou peu, le département d’Etat américain consacre tout un pan de sa stratégie d’influence à des figures locales directement approchées car identifiées comme étant « amenées à prendre des responsabilités ».
Une disctinction passée relativement inaperçue en France, où M. Ben Ahmed est surtout connu pour avoir neutralisé, en juillet 2013, un homme armé d’un fusil à pompe dans un cinéma. […]
A 39 ans, cela fait plus de vingt ans que Fouad Ben Ahmed œuvre pour une meilleure intégration des habitants de Seine-Saint-Denis, où il a toujours vécu. Son parcours ? Celui d’un « militant de base », dit-il sans fausse modestie. Au départ animateur en centre de loisirs, il est aujourd’hui secrétaire de section du Parti socialiste à Bobigny et directeur du pôle Démocratie locale à la mairie de Bondy. Pour lui, la politique et l’associatif sont complémentaires. La première est «indispensable pour faire bouger les lignes», le second permet «d’agir directement sur l’humain».
Français, musulman et d’origine tunisiano-algérienne, M. Ben Ahmed se retrouve dans la vision de l’intégration promue par Tufts. « A l’heure où les sociétés française, européenne, mais aussi américaine sont mises à l’épreuve par la crise économique, migratoire et le terrorisme, nous réfléchissons à comment aborder ‘l’autre’ », détaille Heather Barry, directrice associée de l’Institute for Global leadership, à l’initiative du prix. « En choisissant M. Ben Ahmed, nous voulons récompenser une approche pragmatique des choses, qui n’est ni dans l’émotion ni dans le rejet de l’autre », poursuit-elle.
Une approche qui passe par l’acceptation des particularités de chacun. Car pour M. Ben Ahmed, gommer ces spécificités au profit d’une adhésion à une identité unique ne permet pas de mieux vivre ensemble. Cette approche aurait plutôt tendance à générer des frustrations, voire à mener à la rupture.
« Pourquoi on n’essaierait pas de comprendre l’autre, plutôt que de vouloir faire en sorte qu’il nous ressemble ? », résume-t-il. [….]
Le Monde