David Liu, étudiant [nom d’emprunt] témoigne de sa vie quotidienne à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis).
La marche en hommage à Chaolin Zhang [décédé à la suite d’une agression], qui a eu lieu le 14 août à Aubervilliers, était une grande première. Les précédentes manifestations organisées par des personnes d’origine asiatiques avaient eu lieu à Paris, à Belleville en 2010 et Place de la République en 2011.
J’étais en tête du cortège. On m’a certainement reconnu : le soir-même, l’une des voitures de mes parents était vandalisée ; trois jours plus tard c’était au tour de la deuxième.
Je suis né à Paris, mais ma famille a aménagé à Aubervilliers lorsque j’avais 7 ans. C’est là-bas que j’ai passé ma scolarité. Dès le primaire, on me traitait de “chinetoque”. On me demandait si mes parents étaient restaurateurs, puis : “Ils cuisinent des chiens, des serpents ? Et c’est bon ?” […]
J’ai pris l’habitude, depuis cette époque, de détourner systématiquement les yeux lorsque je croise des jeunes en bande, pour éviter le : “Pourquoi tu me regardes, t’as un problème le Chinois ?” […]
À mes 15 ans, mes parents ont décidé de me mettre dans un lycée privé, à Paris, où l’éducation était stricte mais le climat beaucoup plus rassurant. Jusqu’alors, je n’avais toujours eu que des amis asiatiques. On vivait la même chose, on se comprenait, on traînait donc naturellement entre nous. Au lycée, j’ai découvert des gens de tous les horizons, aussi bien des jeunes d’origine africaine, maghrébine que des Français habitant sur Paris depuis plusieurs générations. Moi qui étais très introverti, je me suis ouvert.
Pour autant, je n’ai pas perdu mes vieux réflexes. Aujourd’hui encore, lorsque je rentre de ma fac parisienne jusqu’à Aubervilliers, j’évite de prendre le métro après 22 heures et je contourne les regroupements de trois, quatre individus. [….]
Mes parents me supplient, pour la prochaine manifestation, qui aura lieu le 4 septembre à Paris, de ne pas monter sur les camions ni porter de banderole. […]
Merci à Olifaxe