Jérôme Fourquet, directeur du département opinion de l’institut de sondage IFOP explique les raisons pour lesquelles le Front national (FN) n’arrive pas à séduire dans les banlieues et quartiers populaires, malgré son envie de s’y implanter.
Le FN a créé en janvier le collectif Banlieues patriotes et il s’apprête à lancer une émission sur Internet consacrée à « ces territoires abandonnés ».
Le FN essaie de s’implanter depuis les années 2000 dans les quartiers populaires et les communes de banlieue. Observe-t-on une montée du vote frontiste dans ces zones ?
On observe historiquement dans ces zones un vote très massif à gauche. Au second tour de la présidentielle de 2012 par exemple, François Hollande y a obtenu en moyenne 70 % des voix. L’idée que les banlieues et quartiers à forte proportion de population issue de l’immigration se mettraient désormais et de plus en plus à voter FN est un fantasme. Bien sûr, le FN arrive à y faire quelques voix, mais ce sont encore des scores très faibles.
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Pourquoi le FN n’arrive-t-il pas à s’implanter dans les banlieues ?
Essentiellement parce que le fonds de commerce du FN, c’est encore et toujours la crainte, voire le rejet, de l’immigration, notamment maghrébine et musulmane, dont découlerait le chômage, l’insécurité, l’islamisme et aujourd’hui, potentiellement, le terrorisme. Pour le FN et bon nombre de ses électeurs, nos concitoyens issus de l’immigration seront toujours en quelque sorte des « Français de papier ».
L’objectif du FN de Marine Le Pen, c’est d’accéder au pouvoir au niveau national. Et, pour cela, il doit renforcer et développer son audience dans toutes les strates de la société, particulièrement là où il est le plus faible : chez les CSP +, les enseignants, les retraités et, bien sûr, dans les quartiers populaires et les banlieues. Il a d’ailleurs constitué des collectifs à destination de ces électeurs.
Le FN dispose déjà d’un socle très élevé dans les milieux populaires non issus de l’immigration maghrébine, dans les zones péri-urbaines et parmi les commerçants, artisans et indépendants. On peut d’ailleurs penser qu’il n’est pas loin d’avoir fait le plein dans ces catégories.
L’objectif est donc maintenant de faire flèche de tout bois, et d’aller gratter des voix ailleurs. […]
Le Monde