La présence de Justin Trudeau, Premier ministre du Canada, dans une mosquée imposant la séparation entre hommes et femmes suscite des remous. Des groupes de femmes se plaignent que ce passage cautionne une pratique misogyne.
C’est le cas du Conseil canadien des musulmanes. Sa directrice, Alia Hogben, rappelle que, « malheureusement, bien que certains d’entre nous, musulmans, s’opposent à la ségrégation des sexes dans les mosquées et dans les rassemblements sociaux, la plupart sont plus traditionalistes et n’ont pas de problème avec la séparation ». Elle assure néanmoins que certaines mosquées permettent la mixité, signe que « ça peut être fait ». « Ç’aurait été bien qu’il réclame que lui et ses ministres féminines s’adressent à l’assemblée en même temps et non de manière séparée. Au moins, cela aurait fait preuve d’égalité des genres. »
Pour Djemila Benhabid, auteure du livre Ma vie à contre-Coran et ancienne candidate péquiste, cette visite est la preuve que « les droits des femmes sont si peu de chose aux yeux [de M. Trudeau]. L’égalité s’arrête à la porte de la mosquée ». Que la mosquée sépare les hommes des femmes n’a « rien de nouveau », admet-elle. « Mais que la puissance publique puisse endosser cette posture ségrégationniste par la présence même de notre premier ministre nous en dit long sur le degré de compromission avec un islam incapable de s’élever à la démocratie et de se renouveler. »
La Fédération des femmes du Québec (FFQ) n’a pas souhaité se prononcer sur le sujet. Pour le droit des femmes du Québec (PDFQ), un groupe ayant vu le jour pour se dissocier de la FFQ jugée trop conciliante sur les questions du port du voile, déplore la visite. La présidente de PDFQ, Michèle Sirois, note que « la ségrégation raciale, on se bat contre depuis longtemps. Je ne vois pas un politicien qui accepterait d’aller dans un endroit où on dirait les Noirs d’un côté, les Blancs de l’autre. Mais pour les femmes, il semble que ce soit moins grave ».
Le Devoir