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Tribune d’Ethan Katz, professeur à l’université de Cincinnati (Ohio), sur les relation entre juifs et musulmans en France.
Pourquoi débutez-vous l’histoire de ces relations en France métropolitaine avec la guerre de 1914-1918 ?
C’est à ce moment-là que les interactions entre juifs et musulmans prennent une ampleur significative. La France, qui compte à l’époque environ 110 000 juifs, voit arriver un contingent important de musulmans : avant la guerre, ils étaient seulement 12 000 ; on en compte 400 000 entre 1914 et 1918, même si tous ne s’installent pas de manière définitive.


[…] Comment la société française évolue-t-elle à partir des années 1970 ?
A la fin des « trente glorieuses », les Français se rendent compte que la présence musulmane sera désormais permanente. Le discours politique sur les musulmans se durcit, l’extrême droite progresse. Dans les années 1980 survient néanmoins la possibilité d’un apaisement, avec l’affirmation, sous la présidence de François Mitterrand, d’un droit à la différence. Au sein de SOS Racisme, de jeunes juifs et de jeunes musulmans se retrouvent ainsi côte à côte parce qu’ils se sentent menacés par la montée du Front national. Le discours est moins celui de la compétition, davantage celui de la coopération.
Mais le mouvement Touche pas à mon pote s’effondre, et, dans les années 1990, la concurrence communautaire refait surface, notamment sur une base mémorielle : s’opposent alors le souvenir de la Shoah et celui de la colonisation.
Aujourd’hui, le contexte est particulièrement tendu. La France ressent toujours les effets de la seconde Intifada de l’automne 2000. Les actes antisémites atteignent des sommets inédits depuis la seconde guerre mondiale, et un nombre important de musulmans en sont les auteurs. Le djihadisme international amène en outre des musulmans à prendre pour cible des juifs. On voit aussi croître le nombre d’actes racistes contre les musulmans. Ainsi que des gestes plus quotidiens de xénophobie qui ne sont pas signalés aux autorités – discriminations à l’embauche, contrôles au faciès.
Comment apaiser ce climat ?

Les Français doivent trouver une manière de vivre ensemble qui passe par le respect des lois de la République, mais aussi par le droit à la différence dans l’espace public.

Au cours du XXe siècle, juifs et musulmans ont exprimé leur attachement à la France tout en manifestant ouvertement leurs convictions religieuses, et cela n’a pas posé de problème. Il faut redécouvrir une laïcité plus souple : la kippa et le hijab ne sont pas nécessairement hostiles à la France.
Le Monde

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