Cinéma, théâtre, et plus largement la télévision…Quelle place pour les minorités visibles? Le paysage culturel et médiatique est-il le véritable reflet de la société ? Pour en débattre, Nora Hamadi reçoit dans l’émission Un Monde en Docs Firmine Richard, comédienne, Bariza Khiari, Sénatrice PS de Paris et François Durpaire, historien spécialiste de la diversité culturelle.
Pour François Durpaire, l’autocensure et la transmission des stéréotypes dans la société passe par le processus d’identification des jeunes : « Le préjugé le plus dur, c’est celui qu’on a contre soi même. Quand le garçon noir dit j’ai plus de chance en basket qu’en littérature, il y a un problème. » Il ajoute : « On le voit bien dans le documentaire, Pascal Légitimus et Lucien Jean-Baptiste disent qu’ils sont rentrés dans le métier parce qu’ils ont vu Henri Salvador. Ils ont vu un noir qui faisait rire à la télé puis se sont dit : ça, on peut le faire. On peut imaginer que les enfants aujourd’hui qui regardent la télévision française en 2016, voient Harry Roselmack sur TF1, Karine Guiock sur M6, Aurélie Casse sur BFMTV, Audrey Pulvar sur I Télé, et se disent, peut-être que je peux non pas seulement faire rire, mais aussi être journaliste».
Bariza Khiari enchérit: « Le rôle des médias est éminent car ils formatent les représentations. Le voleur, le voyou, le violeur, serait souvent noir ou arabe, et le médecin sera souvent blanc. Alors que dans la vraie vie, quand nos compatriotes vont dans les hôpitaux, notamment aux urgences, le médecin sera plus souvent noir ou arabe car il sera la variable du budget de l’hôpital, parce qu’il est payé moins cher. C’est la problématique des diplômes étrangers. »
Entre le clown Chocolat de la fin du 19eme et aujourd’hui rien n’aurait changé ?
Pas si sûr, pour Bariza Khiari. Elle souligne : « les choses ont régressé par endroit, les choses ont avancé par ailleurs. Au Sénat, il y avait un président qui s’appelait Gaston Monerville, dans les années 60. Aujourd’hui, on ne pourrait pas imaginer un Président du Sénat noir. Là, c’est la régression ». François Durpaire ajoute « Gaston Monerville disait que La France n’est pas un pays raciste car le deuxième personnage de l’État est noir. La France est un pays raciste car je suis le seul ».
Mais les choses changent au sein du monde politique, des quotas ont été instaurés. Ils visent à pallier la sous-représentation des femmes. Selon l’INSEE, en 2015, les femmes représentaient respectivement 45,9% et 50 % des parlementaires européens et des conseillers régionaux français. Pour Bariza Khiari, «En politique, les femmes des minorités visibles ont plus de chance, parce qu’elles sont les variables d’ajustement de la parité. C’est-à-dire, d’une part, en étant femme, d’autre part, en étant issue de l’immigration, on remplit deux quotas. Donc les femmes ont plus de chance que les hommes en politique. Il suffirait d’avoir un petit handicap pour remplir un troisième quota. »
Des quotas dans l’industrie culturelle ?
Firmine Richard répond : « J’étais dès le départ, pour les quotas » dans le cinéma (…) « S’il n’y avait pas eu de quotas aux États-Unis, nous n’aurions pas eu la même représentativité ».
Hormis quelques exceptions, les discriminations sont toujours présentes dans le paysage culturel et médiatique français. Pour combattre le manque de diversité dans la culture, des initiatives sont prises pour les jeunes comédiens ayant subit la discrimination dans la pratique de leur métier. La formation 1er Acte, dispensé par le Théâtre National de Strasbourg, le Théâtre National de la Colline et le CCN2- Centre chorégraphique National de Grenoble, tente de promouvoir une plus grande diversité culturelle. Mais le chemin reste long. […]
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