FIGAROVOX/CHRONIQUE – Si les propos du président sur les footballeurs ou les magistrats ont choqué, ceux sur l’islam et l’immigration ont provoqué moins de remous. Gilles-William Goldnadel s’étonne de ce silence qui traduit la gène d’un «camp du Bien» en mauvaise posture.
On aura beaucoup disserté sur ses confidences vespérales à deux journalistes d’un quotidien du soir, mais il n’est pas sûr que l’on en ait tiré la leçon principale.
Je n’ai point entendu un concert de protestations touchant à l’expression par le chef de l’État de sa pensée profonde sur l’islam et l’immigration. Alors qu’il s’agit des deux questions qui fâchent le plus, les Français, en ce compris les plus vétilleux, n’ont pas été fâchés des propos officieux et pourtant détonants de leur président.
- Sur l’immigration invasive: «je pense qu’il y a trop d’arrivées, d’immigration qui ne devraient pas être là.… C’est Sisyphe! On les fait parler Français, et puis arrive un autre groupe, il faut tout recommencer. Ça ne s’arrête jamais… donc, il faut à un moment que ça s’arrête».
- Sur l’islam, et sans craindre l’amalgame devant pourtant deux représentants d’un journal ombrageux: «il y a un problème avec l’islam, c’est vrai. Nul n’en doute». Le voile?: «Un asservissement»…
- Sur ces déclarations de Nadine Morano, qui lui valurent l’opprobre et la moquerie médiatique et politique en ce compris dans son propre camp: «Je suis convaincu que, quand on interroge les Français, ils sont majoritairement sur sa position. Ils pensent: ‘on est plutôt des blancs, il y a plus de blancs que d’autres’»…
- Enfin, sur le risque d’affrontements ethniques: «comment peut-on éviter la partition? Car c’est quand même ça qui est en train de se produire: la partition».
Le plus important habite ici: l’ensemble des propos qui précèdent- s’ils avaient été prononcés par le même ou par quelqu’un d’autre à la télévision auraient fait l’objet d’une déflagration atomique-n’ont pas fait l’objet d’une contestation factuelle, morale ou politique générale.
Celui qui les a prononcés n’est pourtant pas n’importe qui: il est le représentant officiel de la gauche morale, intronisé par le Parti Socialiste, oint par le suffrage universel.
Celui qui les a prononcés ne les a pas contestés. Il ne s’en est pas excusé parce que nul ne lui a demandé de le faire. S’agissant des magistrats ou des footballeurs, le président était coupable d’une généralisation abusive qui lui fut reprochée. Touchant à la question migratoire ou islamique, nul aujourd’hui ne s’est hasardé à lui faire ce mauvais procès qui était de rigueur, il y a encore peu, pour cause de racisme.
François Hollande pouvait dire impunément et sans avoir à le regretter ce qu’officiellement le clergé médiatique, politique et même épiscopal réprouve encore hautement contre l’avis des gens.
L’étrange tragi-comédie des bavardages présidentiels qui aura sans doute épuisé définitivement le crédit d’un responsable déjà largement à découvert, aura eu au moins le mérite d’illustrer la folie de l’époque: il est désormais licite de penser convenablement à condition de ne pas le chanter, ce qui serait inconvenant.
Qu’un maître en hypocrisie ait pu contribuer, à son corps défendant, au dynamitage de la plus formidable et dommageable hypocrisie du temps n’est pas le moindre signe du surréalisme de l’époque.