Alors que les policiers manifestent cette semaine leur colère, retour sur la première grande mobilisation des policiers parisiens qui a secoué les bases de la IV République.
Une journée déplorable. C’est ainsi que Le Figaro qualifie ce jour du 13 mars 1958 où des policiers en colère se sont rassemblés hurlant et sifflant devant les portes de l’Assemblée nationale. Les policiers qui aujourd’hui manifestent se souviennent-ils de cette première mobilisation? Elle a pourtant sapé les fondements de la IV République. C’est ce que soutient l’historien Emmanuel Blanchard, maître de conférences en sciences politiques à l’Université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines.
Les slogans fusent: «Nos 7.800 francs», «La prime de risque». Selon France-Soir cité par Emmanuel Blanchard, on entend même: «Vendus, salauds! Nous foutrons même une grenade au Palais-Bourbon.»
(Les policiers manifestent dans le cour du 19-août de la préfecture de police de Paris le 13 mars 1958 avant de se diriger vers le Palais-Bourbon.)
Une journée déplorable donc. Pour deux raisons selon Le Figaro du 14 mars 1958 : la plus frappante est «la carence de l’autorité qui de ministère en ministère, de demi-promesses à demi tenues en demi-refus moins résistants encore laisse croître un énervement au bout duquel le mécontentement devient explosif.» L’autre est la façon «inadmissible» dont la police a tenté d’imposer ses revendications pourtant justifiées.
Quelles sont alors ces revendications ? «Réajustements de salaires et prime de risque.» Les policiers qui en 1948 ont accepté le retrait de leur droit de grève n’ont pas pour autant abandonné leur droit syndical. Dix ans plus tard, alors que la France s’enfonce dans le marasme de la guerre d’Algérie, la colère gronde dans les rangs des agents de police. Menacés par les groupes armés de la fédération de France du FLN, ils ont déjà perdu un gardien de la paix parisien, assassiné en février.
A l’appel du Syndicat général de la Police (SGP), un rassemblement est organisé le 13 mars dans la cour de la Préfecture de police. C’est un succès: pas moins de cinq mille policiers parisiens en civil répondent présents. La manifestation silencieuse dégénère rapidement en un «tintamarre de sifflets à roulette, de sonneries, de sirènes d’alarme, de coups d’avertisseur» raconte le Figaro. Un sous-directeur de la police municipale qui tente de calmer les troupes est malmené. […]
Le Figaro
Merci à Maye