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25/10/16

Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce recrutement, qui s’est fait contre l’avis de la place Beauvau, rencontre un franc scepticisme. De la part des anciens de Charlie Hebdo, d’abord, Patrick Pelloux et Zineb El Rhazoui en tête, qui se sont dits choqués dans les colonnes du Figaro. Mais également de la part des médecins de la Pitié-Salpêtrière, où Farid Benyettou a fait ses classes d’élève-infirmier, et que le quotidien national a longuement interrogés.
(…) Ce qui a notamment troublé les praticiens qui ont travaillé avec lui, c’est qu’il leur avait soigneusement caché son passé. Pour ce médecin, interrogé sous le couvert de l’anonymat, la “rédemption sans culpabilité préalable, sans mea culpa public” reste suspecte. En 2013, regrette-t-il, Farid Benyettou avait été placé en service de psychiatrie de l’adolescent, où “il avait accès à toutes les données médicales concernant des jeunes très vulnérables”.
Certains praticiens du service se souviennent de la proximité de cet élève infirmier avec des adolescents qui, pour certains, se trouvaient “en proie à des problématiques identitaires liées à l’islam”, écrit encore Le Figaro. Un médecin conclut, amer : “C’était comme recruter un pédophile en puériculture”.
(…) Rue89


19/10/16

Dounia Bouzar, figure controversée de la lutte anti-radicalisation , a décidé de travailler avec Farid Benyettou, ancien leader de la «filière des Buttes-Chaumont». Contre l’avis de Beauvau.

(…)
Un étrange duo. Lui, son débit posé et ses bouclettes brunes un peu clairsemées. Elle, sa gouaille du tonnerre et sa chevelure blonde peroxydée. Farid Benyettou et Dounia Bouzar nous ont donné rendez-vous dans une brasserie du VIIe arrondissement parisien, flanqués des policiers en civil qui assurent la protection de la quinquagénaire. Ils s’apprêtent à raconter comment un premier contact, il y a un an, les a menés à travailler ensemble auprès dejeunes attirés notamment par la propagande de l’organisation Etat islamique. Dans le domaine, Bouzar est connue. Elle fut l’une des premières à se lancer en 2014, tentant de fournir une expertise pour lutter contre l’embrigadement jihadiste et «désendoctriner» les potentielles recrues. Sa méthode, critiquée, ne l’a pas empêchée de travailler pour les pouvoirs publics jusqu’à la fin du mois d’août, financements gouvernementaux à la clé. Le profil de Farid Benyettou est plus inattendu. L’homme, né à Paris le 10 mai 1981, a été condamné en 2008 à six années de prison, reconnu comme un des chefs de la «filière des Buttes-Chaumont», qui recrutait des volontaires du jihad pour combattre en Irak. Parmi ses élèves, un certain Chérif Kouachi qui, accompagné de son frère aîné Saïd, a commis en janvier 2015 l’attentat contre Charlie Hebdo.
«Son parcours n’en fait pas un partenaire de confiance»
L’ex-mentor repenti est donc devenu «formateur en déradicalisation». L’évolution a de quoi surprendre. Notamment au ministère de l’Intérieur, où l’on assure avoir toujours opposé un «non» catégorique aux demandes de Bouzar de travailler avec Benyettou : «Son profil et son parcours n’en font pas pour nous un partenaire de confiance.» Quand Bouzar insiste, lors d’un comité de pilotage avec le ministère et le Comité interministériel pour la prévention de la délinquance (CIPD), en janvier 2016, pour faire intervenir l’ancien jihadiste auprès des jeunes suivis par son association (1), le même refus lui est signifié par l’Unité de coordination de la lutte antiterroriste (Uclat). L’ex-éducatrice à la protection judiciaire de la jeunesse n’en a cure et décide de passer outre les consignes.
Bouzar assume : «J’ai discuté avec Farid pendant six mois avant de lui faire pleinement confiance.» Quand Benyettou intervient dans les ateliers, c’est d’abord bénévolement. Puis, en juin, elle décide de passer à la vitesse supérieure et de lui offrir un contrat à durée déterminée, mais cette fois pour une mission de rédaction de contenus pour le compte de sa structure. Au ministère de l’Intérieur, qui ignorait, jusqu’au coup de fil de Libération la semaine passée, l’existence de ces initiatives, on «prend acte» de la constitution de cette improbable doublette, même si l’on regrette que l’ancienne protégée ait désobéi. Une source policière témoigne de l’apparente «bonne foi» de Benyettou, qui «se dépense beaucoup» dans cette collaboration. Il faut dire que les moyens de rétorsion de la place Beauvau sont aujourd’hui peu nombreux. Depuis la fin du mois d’août, Dounia Bouzar n’est plus mandatée par les pouvoirs publics pour intervenir auprès de jeunes radicalisés et travaille à nouveau à son compte. Une rupture initiée au moment du débat sur la déchéance de nationalité.
(…) Libération

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