Les incendies volontaires contre des centres d’accueil ou la baisse de subventions aux associations trahissent un rejet grandissant du pauvre et du migrant. ATD Quart Monde parle de “pauvrophobie”.
Le mot a été officiellement retenu par ATD Quart Monde, après un sondage auprès de ses militants, et lancé le 17 octobre à l’occasion de la Journée mondiale du refus de la misère : la «pauvrophobie», ou rejet du pauvre. Le phénomène n’est pas nouveau, mais il s’installe dans la société française et se manifeste de plus en plus visiblement dans le comportement des riverains, des collectivités locales, des administrations.
Un sentiment mêlé de submersion et de découragement, face à un problème jamais réglé, se répand chez les travailleurs sociaux et dans la société. […]
«On sent un vent mauvais, un effritement des valeurs d’hospitalité et de solidarité», témoigne Florent Guéguen, délégué général de la Fédération nationale des associations de réinsertion sociale (Fnars). «On ne sait pas si les politiques relaient l’opinion publique ou l’alimentent, mais leurs discours culpabilisent les pauvres, les migrants, les bénéficiaires du RSA ou les sans-abri, tous confondus, et les désignent de plus en plus comme des assistés qui profiteraient du système», confirme Claire Hedon, présidente du mouvement ATD Quart Monde. […]
La pauvrophobie prend des formes très concrètes. Certaines villes font preuve d’imagination pour décourager ceux qu’elles considèrent comme « indésirables », rendant, par exemple, le mobilier urbain hostile dans les rues et les transports, comme Angoulême et ses bancs grillagés, qui ne peuvent donc plus accueillir personne. « On ne sait plus où dormir, on nous chasse de la gare, à Mulhouse, le soir, à coup de pieds », témoignait, lors du colloque organisé, à Paris, le 21 octobre, par la fondation Abbé Pierre et la Fnars, une jeune Africaine. […]
A Lyon, par exemple, en pleine canicule cet été, les fontaines du jardin des Chartreux, où s’approvisionnaient sept familles Roms, ont été fermées sur décision de la mairie du 1er arrondissement et du maire de la ville, Gérard Collomb. […]
Des collectivités locales durcissent l’octroi de leurs aides. Le conseil général des Yvelines (à majorité LR) a, durant l’été 2015, réduit de 40 % les subventions aux associations qui accompagnent les bénéficiaires du RSA ; le département du Bas-Rhin (LR) a, en février, fermé des places d’hébergement ; Valérie Pécresse, présidente (LR) de la Région Ile-de-France, a, à peine élue en décembre 2015, retiré le tarif réduit du Pass Navigo (17 euros au lieu de 73 euros) aux bénéficiaires de l’aide médicale d’Etat, destinée aux sans papiers […].