Fdesouche

Bloc-notes de Bernard-Henri Lévy intitulé “Hillary Clinton : identification d’une femme”. Il estime que l’inconscient collectif américain, la manière dont Hillary a pardonné les frasques de Bill a certainement compté à l’heure du choix.

Dans cette campagne électorale américaine, il y a une chose qui sera restée mystérieuse à bien des Européens : c’est la haine dont a fait l’objet, jusqu’au bout, Hillary Clinton. Passe encore Trump, pensions-nous ! Mais Clinton ? La première femme de l’Histoire à tenter l’aventure de la Maison-Blanche ?

Pourquoi, alors qu’elle était leur honneur, ce parfum de réprobation et de disgrâce que l’on sentait jusque chez les femmes et, parfois même, par-delà les rangs républicains ?

Il faut, pour le comprendre, remonter quinze ans en arrière, jusqu’à cette malheureuse affaire Lewinsky qui faillit emporter la présidence de Bill Clinton. […]

Comment une femme humiliée qui a vu la planète entière s’inviter dans sa chambre à coucher pourrait-elle, sans y penser un peu, beaucoup, passionnément, tout le temps, à la folie, envisager d’entrer, de travailler, de venir et de revenir, tous les matins et les soirs de la vie, dans le lieu même de son humiliation ? Et pourquoi, dans ce cas, le fait-elle ? Pour l’amour du bien public, soit. Dans l’intérêt de l’Amérique, admettons. Mais après ? Qui jurera que, dans sa tête, ne tournent pas d’autres raisons ? Y va-t-elle pour se venger ou le venger ? Pour occuper le terrain, signer sa victoire, montrer au monde, et à lui, ce que peut être une présidence Clinton sans tache ? Ou y va-t-elle pour le blanchir, effacer définitivement la souillure et permettre que l’on tourne la page ? Et serait-elle, dans ce cas, comme ces héroïnes de boulevard qui, après avoir caché le cadavre, retournent sur les lieux du crime pour faire disparaître les indices ?

Voilà à quoi pensaient une part des électeurs et des électrices pendant que faisait campagne la secrétaire d’Etat. […]

Il y avait les femmes bafouées d’Amérique se sentant vengées par cette femme admirable et digne, si droite sous les crachats, si pudique,… […]

Mais il y avait aussi les autres, toutes les autres, toutes les chiennes de garde de la vertu conjugale foulée aux pieds que l’on entendait chuchoter que non ! le contraire ! aucune moralité ! aucun respect de rien ! ces Clinton n’ont-ils donc aucun principe ? cette femme manque-t-elle à ce point de classe et de fierté ? moi, si mon mari me trompait et, de surcroît, avec une pouffiasse, j’exigerais de déménager ! […]

Mais le puritanisme américain étant ce qu’il est, il n’avait pas besoin d’en faire plus.

Cela compta au moins autant, dans la conversation publique, que l’incompréhensible affaire des mails ou celle des supposés conflits d’intérêts autour de la Fondation Clinton.

Et je suis convaincu que, lorsque viendra le moment de faire le vrai bilan de cette campagne folle, lorsque l’on prendra le temps de procéder au décodage de sa violence, de ses outrances et de sa vulgarité sans précédent, cette marée grise du non-dit moralisateur, machiste et phallocratique apparaîtra comme l’un des sous-jacents de l’histoire.

Le Point

Fdesouche sur les réseaux sociaux