Analyse d’Arnaud Leparmentier, journaliste au Monde, sur le “plafond de verre des populistes” en Autriche comme en France.
On ne partage donc pas la noirceur de l’agence Bloomberg, qui vient de publier son guide des prévisions pessimistes pour 2017 : crises en série provoquées par Trump, chute d’Angela Merkel, nouveau Yalta avec Poutine et élection de Marine Le Pen. S’ils ont une vraie offre, les Français la confineront sous son plafond de verre.
[…] Soulagement, les Autrichiens n’ont pas basculé dans l’illibéralisme cher à Viktor Orban en Hongrie ou Jaroslaw Kaczynski en Pologne : l’effet domino des populistes s’est arrêté aux portes de Vienne.
Ce signal positif a été occulté par l’échec de Matteo Renzi lors de son référendum sur la réforme constitutionnelle en Italie, le même jour. Défait par les forces populistes, la vieille garde italienne qui veut que rien ne change et ceux qui dénonçaient la dérive solitaire du premier ministre.
De ce dimanche, on pourrait tirer une règle en forme d’espoir : les référendums sont systématiquement perdus par les dirigeants. On l’a vu avec le Brexit. On l’a constaté avec l’Italie sur un sujet qui n’avait rien à voir avec l’Europe. Et on l’a même observé avec Orban : ce dernier a certes gagné à l’automne sa consultation contre l’accueil de réfugiés en Hongrie mais il l’a perdue politiquement, faute de quorum. Si même les populistes ne remportent pas les référendums ! Rangeons cet accessoire, qui permet de dire non sans rien proposer, de coaliser des opposants irréconciliables, d’amplifier les pulsions négatives, au musée des outils dévoyés. […]
On s’en souvient, le FN échoua à remporter les régionales de décembre 2015 dans le Nord – Pas-de-Calais et en Provence-Alpes-Côte d’Azur. Pour accéder au pouvoir, il se divisa sur la nécessité ou non de tempérer son discours, notamment économique et européen, pour élargir son socle à droite. Un an plus tard, Marine Le Pen n’a plus vraiment la main : la recomposition politique l’entrave. […]
La première déconvenue est la désignation inattendue de François Fillon : elle contrarie la stratégie prônée par Marion Maréchal-Le Pen consistant à attirer au FN l’électorat le plus dur des Républicains. […]
Le second revers concerne la stratégie sociale, poursuivie par Florian Philippot, bras droit de Marine Le Pen. Cette approche, qui vise à siphonner ce qui reste d’électorat populaire à gauche, prospérait sur le rejet viscéral de François Hollande. Elle est doublement sapée par l’élimination d’Alain Juppé et le retrait du président sortant, qui redonnent de l’espace à une offre de gauche. […]