La veuve du premier président ivoirien s’estime spoliée de la succession. Sa lutte divise le petit village de Bombon, où le « Vieux » avait acquis un château du XVIIe siècle.
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De la rue du Château, on pénètre l’enceinte de 33 hectares par un petit portail laissé ouvert. Manifestement, le protocole s’est assoupli depuis le temps de Louis XIII, lorsque cette ancienne forteresse médiévale a pris son allure actuelle, élégante et fastueuse. Quelques centaines de mètres plus loin, après avoir traversé un parc, puis un second bordé d’une petite ferme, se dresse le corps principal, devant lequel stationne une demi-douzaine de voitures modestes.
Marlène Meleck, l’intendante, reçoit au château, où elle réside depuis 1975 : « Le président Houphouët-Boigny était très gentil, mais ne venait pas souvent. Une fois par an, peut-être ». A ses côtés, un homme trapu se présente comme le cuisinier du « Vieux ». Vingt-trois ans après sa mort, le père de l’indépendance ivoirienne hante encore les lieux.(…)
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Quatre mois avant de trépasser, en décembre 1993, Félix Houphouët-Boigny a revendu le domaine de Bombon à Isabelle Grunitzky, fille du second président du Togo, Nicolas Grunitzky, parvenu au pouvoir suite au premier coup d’Etat africain après les indépendances et qui sera destitué en 1967 par Gnassingbé Eyadema.
Ce faisant, le « Vieux » a joué un mauvais tour à son épouse, Marie-Thérèse Brou, aujourd’hui âgée de 86 ans et installée dans un village de Haute-Savoie, non loin de Genève. Dans sa lutte féroce engagée depuis 2013 autour de la succession de l’ancien président ivoirien, la veuve a saisi la justice pour exiger l’annulation de cette transaction, au motif qu’elle s’est opérée sans son consentement.(…)
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Si la famille Grunitzky ne séjourne pas fréquemment à Bombon, elle y organise de grandes fêtes une à deux fois par an. Ce qui incommode certains des 900 habitants de Bombon. « Ce sont des enquiquineurs qui n’hésitaient pas à venir se remplir la panse quand on les invitait », fulmine Marlène Meleck. En 2014, ces « enquiquineurs » se sont constitués en collectif « pour la sauvegarde du cadre de vie de Bombon », allant jusqu’à orner de slogans inquiétants les clôtures grillagées délimitant les propriétés riveraines du château.(…)
(…) Le conflit s’est envenimé au point de devenir l’enjeu central des élections municipales de mars 2014. D’un côté, celui qui a été le maire de la commune entre 1984 et 2008, Joseph Berger, « proche » du château, tentait de revenir à la mairie. De l’autre, le maire sortant, Jean-Pierre Girault, soutenu par le collectif. « Girault ? On l’a fait réélire », se vante Richard Briois, l’un des porte-étendards du mouvement de protestation.
Merci à handsome55