Gérard-François Dumont, géographe, professeur à la Sorbonne, et spécialiste de la démographie et de l’immigration, était le 30 janvier 2016 l’invité de Bénédicte Le Chatelier dans “24 heures en questions” sur LCI.
(à 2min40 : “La France n’a pas besoin d’immigrants compte tenu de sa situation économique”)
«La France n'a pas besoin de migrants au vu de… par fandetv22
Bénédicte le Chatelier : “C’est un thème qui fait peur à tout le monde, on ne va pas se le cacher, puisque «Migrant», dans l’esprit d’un certain nombre de personnes, égale risque pour ma sécurité, on commence à avoir peur de l’autre, «Il vient pour me demander de l’aide, et du coup il va me prendre quelque chose». C’est un thème qui va s’installer dans la campagne présidentielle ?”
Gérard François Dumont : “Il s’installe surtout à mon sens parce que cette immigration n’est pas régulée. Je pense que les opinions publiques comprennent très bien qu’il peut y avoir des flux migratoires et qu’il y a des personnes qui méritent l’asile bien entendu, mais ce qui s’est passé ces dernières années depuis 2011, c’est une immigration totalement non régulée puisqu’on n’a pas su qui rentrait sur le territoire. Or, malheureusement, on a appris depuis que parmi ces personnes dont on n’avait pas noté l’identité à l’entrée, certains se sont révélés des terroristes. C’est évidemment une minorité parmi tous ces migrants, mais ça représente symboliquement quelque chose de grave, parce que ça signifie bien que le contrôle à l’entrée n’est pas fait.”
Bénédicte le Chatelier : “Dans tout phénomène, il y a une montée, un pic, et une stabilisation, voire une décrue. On en est où dans cette crise des migrants ?”
Gérard François Dumont : “Là, à priori, on devrait être dans une décrue, grâce à Monsieur Poutine. Les mesures qui ont été prises par M. Poutine – qu’on peut tout-à-fait critiquer – la situation en Turquie fait qu’Erdogan a été obligé de lâcher la main par rapport à des groupes qu’il soutenait militairement à Alep. Donc Alep redevient aujourd’hui une ville où il n’y a plus de choc militaire, comme auparavant. On peut espérer dans la meilleur hypothèse qu’à la suite du cessez-le-feu, il y ait des accords politiques qui permettent de calmer le jeu en Syrie. Ce serait l’idéal. Mais, calmer le jeu en Syrie pour que les Syriens qui le souhaitent puissent retourner en Syrie, ça suppose aussi une aide internationale pour reconstruire le pays.”
Bénédicte le Chatelier : “Ce qu’a dit Angela Merkel, et qui lui a coûté politiquement, mais peut-être qu’il faut expliquer que parfois l’immigration peut-être aussi une chance, notamment économique, mais alors pour le coup les opinions n’y sont pas prêtes.”
Gérard François Dumont : “C’est une chance économique, mais dans une situation très différente selon les pays. L’Allemagne manque de main d’oeuvre. Compte tenu de sa faible fécondité des 30 dernières années, sa population active diminue. On se rappelle par exemple qu’en 2000, l’Allemagne avait ouvert des dizaines de milliers de visas pour faire venir des informaticiens indiens. Donc nous sommes dans une situation entre la France et l’Allemagne totalement différente, parce que d’un point de vue purement comptable, la France n’a pas besoin d’immigrants compte tenu de sa situation économique. Alors que l’Allemagne, c’est impératif pour elle compte tenu de la baisse de sa population active.“