Ouessant, à la pointe de la Bretagne, c’est le cap Horn de l’Europe. La zone des tempêtes, des courants fous. La confluence de l’Océan, l’Atlantique, et d’une mer, la Manche, dans laquelle il vient s’étrangler.
C’est aussi la route maritime la plus fréquentée du globe : chaque jour, 150 navires, 750 000 tonnes de pétrole circulent au large de l’île.
Nous avons voulu comprendre pourquoi, depuis vingt ans, depuis le naufrage de l’Amoco Cadix, aucune catastrophe écologique et humaine majeure ne s’est produite à nouveau. Car ce n’est pas le fruit du hasard. Pour une fois, on s’est organisé. Pour une fois, une politique a été décidée et reconduite. Pour une fois, des hommes d’appartenances diverses (civils, militaires, marins, terriens) ont uni leurs compétences.
Le pivot du système est un remorqueur, L’Abeille Flandre, un des plus puissant du monde, capable de tracter un pétrolier de 550 000 tonnes en charge. S’il avait été là, s’il avait été affrété comme il l’est aujourd’hui pour une mission de service public, l’Amoco n’aurait jamais souillé 200 kilomètres de côtes.
Par force 10 à 12, et au-delà, on découvre ici le métier de ces hommes qui s’obstinent à répéter qu’ils ne sont pas des héros. On découvre que, le 4 janvier 98, un pétrolier fou a failli se déchiqueter sur les roches d’Ouessant puis sur celles de Portsall. On assiste à une prise de remorque, au milieu des marins, sur la plage arrière du bateau.
Et la mer vraiment démontée.