Pour les enquêteurs, l’affaire illustre l’«ubérisation» du trafic d’êtres humains en Europe. Chaque samedi, un couple de septuagénaires portugais (elle 71 ans, lui 76, aidés par le fils de ce dernier) organisait une petite excursion en région parisienne. Mille sept cents kilomètres en minibus et retour dans la foulée..
Le but n’était visiblement pas de visiter la capitale. Le minibus filait vers le nord. Terminus, La Courneuve (Seine-Saint-Denis), où chaque samedi après-midi, le chauffeur prenait en charge des membres de la communauté indo-pakistanaise qui s’étaient échangé le tuyau. Ces étrangers en situation irrégulière allaient tenter leur chance dans la péninsule ibérique, en Espagne ou au Portugal, où ils étaient souvent employés comme plongeurs dans la restauration. Entassés dans le fourgon, à raison d’une dizaine par voyage, ils évitaient ainsi le transit en groupe sur des lignes de bus ou de train plus surveillées depuis le rétablissement, en novembre 2015, des contrôles aux frontières. D’autant que le chauffeur prenait soin d’éviter les grands axes.
En mai 2015, les enquêteurs de l’Ocriest (Office central pour la répression de l’immigration irrégulière et l’emploi d’étrangers sans titre) ont eu vent du manège qui commençait à s’ébruiter au-delà de la communauté. Depuis, ils passaient leurs week-ends à La Courneuve, en planque. Ils ont ainsi repéré 26 passages, pour un nombre de migrants estimé à 530 sur l’ensemble de l’année 2016. Selon les éléments de l’enquête, le prix du voyage pour le sud était de l’ordre de 200€ à 300€ par personne. Ce qui aurait permis au couple de dégager un chiffre d’affaires de 130 000 euros. Les deux septuagénaires, et le fils âgé de 47 ans, ont été arrêtés le week-end dernier. Les Thénardier de la route sont poursuivis pour «aide à l’entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d’un étranger en France». Ils ont tous trois été écroués. […] Le Parisien