Manque d’intellectuels, responsables donnant le sentiment de “vivre de” et non pour leur religion, affichage identitaire du voile… Didier Leschi, qui publie vendredi un ouvrage rare sous la plume d’un haut fonctionnaire, pose un sévère diagnostic sur “l’islam de France” : “Misère(s) de l’islam de France”. Il critique sévèrement le CFCM (Conseil français du culte musulman), “une coquille qui reste à remplir”.
“Il nous manque des Bernanos musulmans”.
“Il manque encore cette dimension d’un islam social qui, à partir de la foi, prouve dans ses actes qu’il prend en charge notre commune humanité”, note Didier Leschi. En quelque sorte “un Abbé Pierre”, que “personne n’a soupçonné de se battre pour le logement des seuls catholiques”.
Ce laïque de la gauche républicaine a été conseiller de Jean-Pierre Chevènement au ministère de l’Intérieur, chef du bureau central des cultes, préfet délégué pour l’égalité des chances en Seine-Saint-Denis.
Les premiers mots de son essai donnent le ton. “Il est quelque chose de pathétique dans la présente situation de l’islam en France“, écrit Didier Leschi, qui voit une “impuissance” de ses acteurs face aux tragédies ayant frappé le pays au nom d’Allah – 238 morts en 2015 et 2016 dans des attentats jihadistes.
Le livre n’est pas tendre avec les responsables cultuels, qui ont hésité entre “dénégation” et “réticences“, notamment dans le rapport à la violence dans les franges les plus radicales de l’islam. L’auteur critique “celui qui, des années durant, a été la figure publique la plus connue de l’islam de France et, dans le même temps, en a incarné l’impasse“, derrière laquelle on reconnaît sans peine le recteur de la grande mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, deux fois président du Conseil français du culte musulman (CFCM).
“Malgré lui, l’État a favorisé la cristallisation d’une bureaucratie des mosquées, avec une partie d’entre elles qui donne le sentiment, de manière constante, de plus vivre de l’islam que pour l’islam“, explique à l’AFP Didier Leschi.
“Ce que ces responsables sont devenus n’est pas attirant pour des jeunes en recherche de spiritualité. Des groupes plus identitaires, salafistes, peuvent leur apparaître comme plus purs“, relève-t-il.
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