Dans un ouvrage à paraître le 13 janvier, « Identitaire. Le mauvais génie du christianisme », Erwan le Morhedec, alias Koztoujours sur internet, dénonce la progression de l’identitarisme, ce « nouvel anti-christianisme », dans les milieux catholiques. Une thèse qui dérange et agace dans certains cercles. “Famille Chrétienne” l’a soumis “à la question”.
Identitaires et identité, quelle différence ?
[…] Je ne suis pas opposé à l’identité contrairement à ce que l’on a pu dire ! L’identité est incontournable. Je préfère qu’existe une identité nationale assumée plutôt que plusieurs identités de substitution qui peuvent tout aussi bien conduire à de graves conflits entre elles. Notre identité n’est jamais achevée. Elle est en perpétuelle modification. Au travers des siècles, l’identité française s’est constituée en plusieurs strates, et elle peut encore se modifier et évoluer. Elle n’est pas figée.
L’identitarisme est, à mon sens, l’utilisation du christianisme de façon purement culturel et totalement détaché de la foi. Les groupes identitaires l’utilisent même à des fins opposés à l’Évangile. […] Ce phénomène d’identitarisation est-il aussi répandu que vous le dites ?
Il est déjà bien engagé, sinon je me serais abstenu d’aller au-devant des critiques. Braquer les catholiques n’est pas mon occupation favorite. Mais il est inutile d’attendre que le phénomène prenne plus d’ampleur encore pour agir, et je ne veux pas que ce soit d’autres qui, un jour, fassent sauter le couvercle et dénoncent cet entrisme identitaire au sein des catholiques. Certains m’en font le reproche, anxieux à la seule idée que des désaccords puissent apparaître publiquement dans l’Église, mais je crois qu’il était nécessaire de le dire.
Cette tentation identitaire n’a-t-elle pas des causes légitimes, comme la colère de ne pas avoir été entendu au moment des débats sur la loi Taubira ou la crainte de voir notre identité disparaître avec la crise migratoire ?
Effectivement, ces dernières années un précipité d’événements explique cette tentation. Alors que les strates supranationales prennent de plus en plus d’importance, l’identité des nations est de plus en plus discutée. Sans parler des pays, comme la France, où il était habituel par le passé de dénigrer la moindre référence à une identité nationale. Se greffent aussi la présence de l’Islam, doublée des menaces terroristes et le sentiment que l’Église est en perte de vitesse, tant sur le plan politique que spirituel. Le phénomène Manif pour tous peut aussi expliciter cet état d’esprit. Face à un gouvernement obtus, les manifestants ont été poussés dans une sorte de jusqu’au-boutisme qui n’était pas l’état d’esprit du départ. Le rejet de la pétition adressée au CESE a été un point de rupture : quand vous avez le sentiment de ne pas être entendu alors même que vous utilisez les voies normales et légales, comment ne pas être tenté de se mettre en marge de la société ? Et que dire des répressions policières lors des manifestations qui ont brisé le réflexe légitimiste d’une partie des manifestants ? Cette accumulation d’incidents doit être prise en compte. […] Famille chrétienne