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Analyse du journaliste Laurent Neumann sur la configuration singulière de cette campagne présidentielle.

L’issue de la présidentielle 2017 est imprédictible. Pire : elle est insondable. Par certains aspects, elle défie même l’entendement.

Il était écrit que cette campagne présidentielle ne ressemblerait à aucune autre – c’est même ce qui la rend aussi incertaine et donc passionnante ! Pas seulement parce qu’elle est la première à se dérouler sous état d’urgence et menace terroriste maximale. Pas seulement parce qu’autour de nous, le monde bascule dans l’inconnu : Trump superstar, Poutine super tsar, Brexit, montée des extrémismes sur le Vieux Continent, Union européenne en voie de dislocation… De tout ce que l’on croyait savoir, il faut sans doute faire table rase pour tenter de comprendre pourquoi rien ne se passe comme prévu. Bref, partir d’une page blanche. […]

À bien des égards, Emmanuel Macron est le symbole même de la singularité de cette élection présidentielle. […]

Il n’a pas de parti derrière lui ? C’est une chance, les partis sont démonétisés. Incarnation des élites à la française, il se présente néanmoins en candidat antisystème ? Oui, mais lui, on le croit. Il parle beaucoup d’économie, mais bien peu des questions régaliennes ? Il n’y a pas que la sécurité dans la vie ! Sa vision libérale rebute une grande majorité de Français ? Oui, mais il y ajoute une pincée de social qui fait défaut à Fillon… Voilà, résumés à gros traits, les paradoxes apparents d’une indiscutable percée sondagière et d’un état de grâce médiatique inégalé. […]

Mais pour Emmanuel Macron, le plus dur commence le 29 janvier, lorsque sera enfin connu le vainqueur de la primaire de la gauche. Pour lui, c’est sûr, mieux vaudrait Benoît Hamon ou Arnaud Montebourg que Manuel Valls. Mais surtout, à partir de cet instant, il devra répondre aux mêmes questions que les autres candidats et, plus encore, débattre avec eux. Que propose-t-il concrètement contre le chômage et pour le pouvoir d’achat ? Quel est son programme précis pour assurer la sécurité des Français ? Quelle politique en matière d’immigration, de santé, de protection sociale ? Quid des impôts, du droit du travail, des 35 heures, de l’école, de l’hôpital, des quartiers difficiles ? Que compte-t-il faire en matière de police, de justice ? Construire des prisons ou pas ? Sortir de l’état d’urgence, ou pas ? Supprimer des postes de fonctionnaires ou pas ? Réduire la dette et les déficits ou pas – et si oui, comment ? Évacuer la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, ou non ? Quelle est sa vision du rôle diplomatique et militaire de la France ? Que dire à Poutine et à Bachar el-Assad ? Que faire avec Erdogan ? Quelle Europe veut-il ? Quelle laïcité ? Quelles institutions ? Quelle démocratie rénovée ? Comment pense-t-il lutter contre le terrorisme et le fondamentalisme islamiste, à l’intérieur comme à l’extérieur de nos frontières ? Que veut-il faire de ces djihadistes français qui s’apprêtent à revenir de Syrie ou d’Irak ? Maintenir nos troupes au Mali et au Sahel, ou pas ? Quel président serait-il, jupitérien ou omniprésent ? Avec quelle majorité gouvernerait-il ? Majorité de gouvernement ou majorités de projets ?

Toutes questions auxquelles les autres candidats sont, chaque jour et depuis des mois, sommés de répondre, mais dont, jusqu’à présent, il est exempté.

Le Point

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