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Pour Laurent Bouvet, la “gauche républicaine” incarnée par manuel Valls risque d’être écartée du jeu politique au profit d’un renforcement de la ligne Terra Nova.

Laurent Bouvet est professeur de Science politique à l’Université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines. Terra Nova est un “think tank” proche du PS.

C’est bien évidemment sur la question des «valeurs» et de la stratégie électorale que les similitudes sont les plus grandes. On se souvient de la fameuse «note» de Terra Nova en la matière en mai 2011 qui entérinait l’abandon des catégories populaires par le PS et la gauche en raison des «valeurs» non progressistes dont elles seraient aujourd’hui les porteuses et qui les conduit dans le bras du FN. Or, la campagne de Benoît Hamon, ses thématiques, ses clins d’oeil… s’adressent pleinement à la «nouvelle coalition» souhaitée dans cette note de Terra Nova pour remplacer les catégories populaires: «jeunes, diplômés des métropoles, banlieues, femmes». La convergence est troublante même s’il est évident qu’elle n’est pas revendiquée chez Benoit Hamon.

C’est en liant étroitement les questions de souveraineté et de solidarité que le FN a conquis aujourd’hui la première place électorale au sein de la catégorie «ouvriers».

[…]

Comment définiriez-vous la ligne Hamon? Est-ce le retour de Terra Nova ?

C’est plus compliqué que ça. Economiquement et socialement, on est chez Benoît Hamon bien moins dans le libéralisme que chez Terra Nova. En termes de maîtrise des dépenses publiques notamment. Même s’il y a des similitudes sur la question de la «fin du travail» et des propositions comme le «revenu universel» qui lui sont liées. On retrouve bien évidemment dans la convergence entre l’inspiration plutôt sociale-libérale de Terra Nova et la formule plus à gauche de Hamon des racines «deuxième gauche» communes: la prise en considération d’une société des individus et des communautés auxquels il faut attribuer des droits plutôt que d’un peuple de citoyens qui sont unis par leurs devoirs communs ; la méfiance vis-à-vis des frontières et de la nation considérés comme des entraves à la liberté de circulation et comme fauteurs de guerre… La confiance dans la construction européenne, même s’il est dit qu’il faut toujours la «réorienter» et la déclarer «plus sociale», est un trait commun également. […]

Cette disparition probable du Républicanisme de gauche vous inquiète-t-elle ?

Ce qui m’inquiète, c’est que des thématiques républicaines à gauche, telles qu’on les a précisées plus haut, ne soient pas présentes de manière forte et explicite dans la campagne présidentielle cette année, et que l’on risque d’assister à un débat dont elles seront quasi-absentes, sous prétexte que les problèmes d’identité ne sont pas du ressort ou ne doivent pas être dans les préoccupations de la gauche – parce que la droite et l’extrême-droite ont développé un discours construit sur le sujet. […]

Le Figaro

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