[Ancien soixante-huitard, Joschka Fischer a été ministre des Affaires étrangères et vice-chancelier de 1998 à 2005. Il a dirigé le parti écologiste allemand pendant près de 20 ans.]
L’orientation géopolitique de l’Allemagne constituera l’une des principales problématiques sous-jacentes des élections fédérales de l’an prochain. Si la propre Union chrétienne-démocrate d’Angela Merkel venait à évincer la chancelière allemande en raison de sa politique sur les réfugiés, le parti prendrait alors probablement un virage plus à droite, dans l’espoir de renouer avec les électeurs partis rejoindre le parti populiste et anti-immigration Alternative pour l’Allemagne (l’AfD).
Or toute démarche consistant pour la CDU à se rapprocher de l’AfD, ou tout simplement à valider ses arguments, serait alors de mauvais augure. L’AfD représente en effet les nationalistes allemands d’extrême droite (et bien d’autres individus encore moins fréquentables), qui souhaitent renouer avec le vieux statut d’homme du milieu, et forger de plus étroites relations avec la Russie. Une coopération entre la CDU et l’AfD viendrait trahir l’héritage d’Adenauer, et équivaudrait à la fin de la République de Bonn.
A gauche aussi certains souhaitent un rapprochement avec la Russie
Dans le même temps, un danger comparable existe de l’autre côté de l’échiquier, dans la mesure où il s’agirait également pour une éventuelle coalition CDU-AfD de pouvoir compter sur Die Linke (le parti de gauche), dont certains membres importants souhaitent effectivement la même chose que l’AfD: relations plus étroites avec la Russie, et diminution voire disparition de l’intégration auprès de l’Occident.
Espérons que l’avenir nous épargnera ce scénario tragique, et que Merkel conservera ses fonctions après 2017. Le futur de l’Allemagne, de l’Europe et du monde occidental pourrait bien en dépendre.