La scène se passe, jeudi 26 janvier, sous les lambris du Quai d’Orsay. Le ministre allemand des affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, qui va devenir « le président Steinmeier » en succédant à Joachim Gauck à la tête de l’Etat en février, fait ses adieux à la diplomatie française.
Officiellement, M. Steinmeier est là pour le lancement de la Nuit des idées, rafraîchissante initiative de la culture française pour beau temps. Ce qui devrait être un moment léger, purement formel, prend soudain un tour grave. En fait de Nuit des idées, M. Steinmeier a visiblement des idées noires. En allemand, il évoque les élections françaises à venir, souligne qu’elles seront déterminantes non seulement pour la France, mais aussi pour l’Allemagne – et pour l’Europe. Puis il passe au français pour implorer son auditoire : « S’il vous plaît, ne cédez pas aux sirènes du populisme. »
Un peu plus tôt, à la Sorbonne, le président Gauck est lui aussi venu faire ses adieux. Il y prononce un discours émouvant ; il y est question d’amour, de littérature et puis d’Europe bien sûr, l’Europe dont il rappelle qu’elle a « engendré beaucoup d’horreurs ». « Il n’y a nullement lieu de glorifier l’Europe, poursuit-il. Elle n’a jamais connu d’âge d’or et n’en connaîtra jamais. Elle est uniquement le théâtre d’une incessante lutte pour l’humanité, la liberté et le droit, la justice et la démocratie. »