La mère et le beau-père d’un petit Audincourtois entendaient visiblement lui inculquer une éducation religieuse rigoriste. Ils ont été condamnés, respectivement à 14 mois et 10 mois de prison ferme pour soustraction d’enfant.
La présidente Cécile Rouvière ne peut écarter le contexte. La mère, 36 ans, et son époux, le beau-père, 43 ans, apparaissent, dans le dossier, comme des croyants rigoristes. « On peut s’interroger sur votre pratique religieuse. Sous mandat d’arrêt, vous avez été interpellé, lors d’un retour en France en 2014, avec une personne fichée S », informe la magistrate.
Poursuivi pour complicité, l’Audincourtois, grande barbe fournie, ton posé, conteste toute dérive extrémiste : « Oui, je suis musulman mais je fais la part des choses. Je ne savais pas que la personne qui m’accompagnait était fichée. »
Un mandat d’arrêt a été décerné à l’encontre de l’ex-Audincourtoise restée en Algérie et qui s’excuse par lettre. « Le tribunal ne peut que regretter son absence au cours de la procédure », assène la présidente. « Elle a peur de la justice », indique l’homme, jamais condamné, bon ouvrier (chez un sous-traitant du groupe PSA).
Le couple a rejoint l’Algérie en octobre 2012 sans en informer le père de l’enfant (qui, en décembre 2012 a obtenu le droit de garde exclusif). « Rien ne justifie que l’enfant (ndlr : né en 2004) n’ait pas vu son père pendant deux ans. Est-ce sur fond religieux ? Est-ce que le conflit est plus important ? On ne le saura pas », regrette le représentant du parquet qui rappelle que « la fuite » était bien organisée (le bail de l’appartement avait été résilié, l’absence de l’enfant « pour quelques mois », justifiée auprès de l’Éducation nationale).
Les craintes du père apparaissent en filigrane dans sa déposition : « En France, il (le beau-père) lui interdisait de jouer avec les “mécréants”, de manger des bonbons qui contenaient de la gélatine de porc. Il ne pouvait pas avoir des photos de moi ou garder les “yeux” des doudous (ndlr : la représentation figurée dans l’islam est sujette à discussions). » Le garçon conserve quelques souvenirs des deux ans passés au Maghreb, il parle juste d’un beau-père dur, parfois violent, qui le punissait.
Le père, installé en Auvergne, reconnaît : « Mon petit garçon n’allait pas plus mal que ça à son retour. Sa mère, il l’a de temps en temps au téléphone. » De se tourner vers le beau-père, qui a effectué trois mois de détention préventive, privé de voyages en Algérie (où vivent sa femme et son autre fils, le demi-frère du petit Audincourtois aujourd’hui installé en Auvergne) : « C’est bien fait. Maintenant, tu sais ce que ça fait d’être privé d’un fils. » À la défense, Me Rouzet estime que l’affaire a été surdimensionnée : « On a trop insisté sur le contexte prégnant, le fichier S, etc… Madame avait peur de perdre la garde. Leur départ n’était pas concerté. Ils étaient dans une situation professionnelle très compliquée, voulaient voir si l’herbe n’était pas plus verte ailleurs. Ils ont manqué de lucidité. Mais ils ont fini par ramener l’enfant (ndlr : qui a pris un vol seul, accompagné par une hôtesse de l’air avec l’argent du père). »