Depuis son lit d’hôpital, le jeune homme blessé par des policiers à Aulnay-sous-Bois a fait le récit de son interpellation à l’un de ses avocats. Il évoque des coups, des insultes et des moqueries, et surtout la blessure infligée “volontairement” par l’un des policiers avec sa matraque.
Pendant plus d’une dizaine de minutes, Théo, le jeune homme de 22 ans blessé lors de son interpellation par des policiers à Aulnay-sous-Bois, a raconté les faits en détail à l’un de ses avocats. Sur son lit d’hôpital, il confie s’être retrouvé au milieu de l’interpellation par hasard, alors qu’il venait de sortir de chez lui et allait saluer plusieurs connaissances, lorsque les policiers sont arrivés pour procéder à un contrôle d’identité. Il raconte avoir alors été choqué par la violence de ces interpellations, et explique avoir tenté de se placer dans le champ des caméras volontairement.
“Je savais que là où on était il n’y avait pas de caméras, j’ai réussi à me débattre, je suis parti devant les caméras. J’ai pas cherché à fuir, j’ai dit aux policiers, ‘vous avez déchiré mon sac’, ils me répondent ‘on s’en fout’. Ils sont trois à me saisir, je leur demande, pourquoi vous faites ça, ils ne me répondent pas, ils me disent que des injures”, commence le jeune homme.
Il raconte ensuite comment l’un des policiers est revenu vers lui et l’a blessé “volontairement” à l’anus avec sa matraque. Une blessure qui lui a valu d’être opéré rapidement après son interpellation.
“Il me regarde, j’étais de dos, mais j’étais en trois quart, donc je voyais ce qu’il faisait derrière moi. Il prend sa matraque et il me l’a enfoncée dans les fesses, volontairement. Dès qu’il m’a fait ça je suis tombé sur le ventre, j’avais plus de force. Là il me dit ‘les mains dans le dos’, j’ai dû mettre mes mains dans le dos, ils m’ont mis les menottes et là ils m’ont dit ‘assieds-toi maintenant’, je leur ai dit ‘j’arrive pas à m’asseoir, je sens plus mes fesses’, et ils m’ont mis des gaz lacrymogènes dans la tête, dans la bouche, un coup de matraque en pleine tête, et moi j’avais tellement mal aux fesses que cette douleur-là semblait éphémère (…) c’était vraiment trop dur pour moi. (…) Mon pantalon était baissé, j’avais vraiment mal”, insiste Théo.
Le jeune homme poursuit son récit en expliquant que les policiers ont tenté de l’entraîner hors du champ des caméras, mais lorsqu’un habitant du quartier est intervenu, leur demandant avec insistance ce qu’ils allaient faire au jeune homme, ils l’ont alors placé dans leur véhicule pour l’emmener au commissariat.
“J’avais du mal à marcher, je n’étais même pas moi-même. Je croyais que j’allais mourir, je marchais mais parce qu’ils me tenaient bien”. Dans la voiture, le jeune homme dit avoir subi d’autres coups, des moqueries et des insultes. Il cite notamment “espèce de salope” et “bamboula”.
D’après son témoignage, les policiers ont remarqué qu’il saignait à l’endroit où le policier avait utilisé sa matraque, et cela aurait fait redoubler les moqueries. Au commissariat, on lui demande de s’asseoir, il répond qu’il n’est pas en mesure de le faire. Un policier lui aurait alors dit de s’allonger. Au bout de quelques minutes, l’un des agents décide d’appeler le Samu.
“Le Samu me retourne, il regarde la plaie et me dit ‘là c’est très grave, il y a au moins 5 ou 6 centimètres d’ouverture, faut l’opérer le plus rapidement possible. (…) Ils ont dit que j’avais perdu beaucoup de sang. (…) Le coup de bâton dans les fesses qu’ils m’ont mis, ça m’a marqué à vie, c’est une chose que je ne souhaite à personne, physiquement je suis très diminué, j’arrive pas à bouger, là comme vous me voyez ça fait trois heures que je suis comme ça. (…) Je dors pas la nuit”, conclut le jeune homme.
Le sœur de Théo, venue témoigner, a évoqué lundi après-midi l’état physique “critique” de son frère. Outre son traumatisme psychologique, le jeune homme souffrira sans doute des séquelles de sa blessure, mais les médecins ne peuvent pas encore déterminer quelles seront ces conséquences à long terme.
“Les médecins ne sont pas capables de se positionner aujourd’hui et de nous dire quelles séquelles il va avoir. On doit attendre, deux mois au moins. Aujourd’hui il a une poche. On nous parle de beaucoup de choses, notamment d’incontinence. Donc on ne peut pas dire qu’il va bien, il est dans un état assez critique”, a expliqué la jeune femme.
Merci à Padamalgam Fopastigmatizé