Article de Jean-Paul Brighelli sur la formation des médecins.
Grâce à la reconnaissance automatique des diplômes, l’Europe nous envoie de jeunes médecins au niveau inquiétant. Et si demain c’était le vôtre ?
Nombre de pays européens sont ravis de recevoir chez eux, pour plusieurs années, des petits Français à fort pouvoir d’achat, qu’ils qualifieront selon leurs critères, et qu’ils renverront, frais émoulus de leurs universités, dans nos hôpitaux. Rappelez-vous bien : seuls 10 % d’entre eux ont un niveau satisfaisant. Les autres vous tueront.
Le Quotidien du médecin du 2 février dernier consacre un dossier au problème des « internes incompétents » – un scandale, d’après cette publication réservée aux praticiens en exercice. Un scandale d’autant plus monstrueux qu’à l’horizon 2025, quand les derniers médecins venus du baby-boom auront pris leur retraite, il ne restera en France, pour exercer dans les déserts médicaux – partout en dehors des très grandes villes où les CHU veillent encore à la qualité du recrutement – que ces médecins du second rayon. Parfois des étrangers non francophones, ce qui ne facilite pas vraiment l’examen clinique, mais le plus souvent des Français formés à l’étranger (je ne saurais trop vous recommander les universités roumaines de Cluj et de Iasi, véritables usines à former des morticoles) ou ailleurs.
Surtout, ne pas croire que le problème est récent. Il y a un an déjà, le même quotidien titrait : «Les autorités hospitalo-universitaires s’alarment du nombre croissant d’internes incompétents», soupçonnant que les aptitudes des étudiants formés hors de France laissaient à désirer : huit internes venaient d’être suspendus pour suivre un stage de remise à niveau. Mais alors, tout va bien ? Vous êtes naïfs : «es huit internes concernés ont été réintégrés dans le cursus», et «l’agence régionale de santé d’Île-de-France n’a pas souhaité reconduire ces stages, redoutant de s’exposer au recours d’un étudiant concerné». Parce qu’en soi, un tel stage est illégal : ils sont internes, et n’ont plus à démontrer leurs capacités. […]
Résumons. Après avoir passé l’internat, les étudiants passent depuis 2004 les ECN (épreuves cassantes nationales) qui n’est pas un examen (tout le monde est admis par principe), mais une méthode de classement : en fonction du rang, les étudiants peuvent choisir parmi toutes les places disponibles dans les diverses spécialités, les derniers classés prenant ce qu’il reste, quelque part dans une France profondément périphérique. Vous pouvez aussi bien choisir de rendre copie blanche, vous serez classé quand même. […]
La conférence des doyens de médecine, soutenue par l’Ordre des médecins, propose donc la mise en place d’un certificat de compétence clinique (CCC) préalable aux ECS – exigible pour les étudiants inscrits en France et issus des autres pays européens. Ces grands patrons ont même alerté Harlem Désir, le très utile secrétaire d’État chargé des Affaires européennes – qui n’a pas donné suite. Parions que Bruxelles, qui veille à l’égalité des traitements pour tous ses ressortissants, s’en émouvra bientôt. […]