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Par Jérémy Robine, Maître de conférences à l’Institut français de géopolitique (IFG), université Paris-VIII

Le Front national prospère sur l’incapacité à penser la question raciale au sein de la nation française. Aucun candidat ne traite de l’existence d’un ordre racial inégalitaire engendrant frustrations et angoisses.

Parmi les nombreuses tribunes publiées dans la presse alors que le Front national (FN) vient de rassembler plus d’électeurs que jamais, celles des géographes font la démonstration de ce que permettent désormais les techniques liées au «big data» et à la géomatique. Elles mettent particulièrement en avant les caractéristiques des différents territoires, plus ou moins urbains ou ruraux, centraux ou périphériques, la taille des pôles urbains et parfois en les corrélant aux informations disponibles sur leurs habitants. C’est ce qui permet notamment à Frédéric Gilli, dans une tribune publiée dans le Monde le 27 avril, de tordre le cou aux «géographismes» (cette fameuse ligne qui diviserait en deux le pays, France des villes contre France périphérique) que suscitent immanquablement les cartes simplistes que les ordinateurs permettent de réaliser si facilement.

L’information géographique en France souffre d’un manque béant qui, à de rares exceptions, affecte également le champ intellectuel. Cette béance, c’est la race, naturellement entendue comme catégorie sociale et non biologique, ou plus exactement comme un ensemble, construit dans le débat social et politique, de représentations des identités des uns et des autres et de la nation. C’est vrai, en général, que l’on parle d’éducation, de police, d’emploi ou de santé ; c’est criant alors que le FN a obtenu le plus large succès électoral de son histoire, succès bâti sur la prégnance des catégories raciales et le tabou qui les entoure dans le débat public. Le terme d’«extrême droite», encore généralement utilisé pour qualifier le FN, bien que celui-ci s’y oppose, masque le fait qu’il ne s’agit pas d’un parti qui serait «juste» plus à droite que la droite classique. La caractéristique historique et actuelle du FN est de prospérer sur l’incapacité à penser la question raciale au sein de la nation française, ce que l’on doit se résoudre à reconnaître comme l’un des traits de l’idéologie républicaine.

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Libération

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