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Pour l’ancienne journaliste de télévision, Anne Sinclair, fondatrice de la version française du «Huffington Post», les blessures ouvertes et révélées durant cette campagne présidentielle ne sont pas près de cicatriser. Article daté du 5 mai.

Et si, avec Emmanuel Macron, la «génération Sinclair» était en train de disparaître? A cette question, l’ancienne journaliste vedette de la télévision française sourit, puis acquiesce. Son livre récemment paru Chronique d’une France blessée (Ed. Grasset) raconte quelque part cette disparition programmée.

Les sondages sont unanimes. Emmanuel Macron semble très bien placé pour l’emporter. Une raison d’être rassurée ?

Je ne pousserai aucun ouf de soulagement si Marine Le Pen est battue dimanche après avoir réuni 40% des électeurs. Une terrible question restera posée: que veut la France désemparée qui aura voté pour elle? Et quelles seront les conséquences, pour notre vie publique, de ce fossé électoral alors que les Français voteront un mois plus tard pour les législatives ? […]

Son aventure est extraordinaire. Elle est marquée du sceau de l’intuition et de l’audace. Contrairement à Marine Le Pen, il ne divise pas la France entre le camp du bien et celui du mal. Le croyais-je capable de réussir son incroyable pari ? Non, je n’y croyais pas. Se lancer ainsi : sans parti, sans structure… Et puis la chance lui a souri. […] Est-ce que le centre a aujourd’hui un avenir en France? Est-ce que l’élection d’Emmanuel Macron, si elle survient, va faire disparaître les fractures? Je n’y crois pas. Le chapitre ouvert par cette folle campagne est loin d’être refermé. La difficulté, pour lui, est qu’il va d’emblée se retrouver écartelé entre les aspirations de son électorat cible, ceux qui ont entre 30-35 ans, qui sont bien intégrés et qui désirent un changement rapide. Et tous les autres : les anciens, les révoltés…

Ces fractures, quelles sont-elles ?

Il y a d’abord deux France. Une France qui a confiance dans l’avenir. Et une France qui en a peur. Ce pays-là, tenté par les extrêmes, se sent à l’écart de tout, de la mondialisation, de la révolution numérique, du progrès social. Cette France ne vit la modernité que comme une source d’inégalités accrues. […]

Regardons les choses en face. Dimanche, comme dans toutes les démocraties, une grande majorité d’électeurs voteront contre. Il faudra donc très vite sortir de ce cercle vicieux. On peut se faire élire par défaut. On ne peut pas être un président par défaut.

Le Temps

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