EXCLUSIF – Le maire de Lyon Gérard Collomb aura-t-il lui aussi, comme son mentor en politique Pierre Mauroy, à répondre devant la justice d’un présumé détournement de fonds, pour une affaire d’emploi fictif ? “Une vieille affaire” répond on du côté du maire de Lyon. Sauf qu’elle n’est pas prescrite. Les faits concernent l’association Léo Lagrange, suspectée d’avoir été une “pompe à fric” pour le PS. Ironie de l’histoire, cette association a été fondée en 1951 par… Pierre Mauroy.
Dix-huit ans après les faits, deux juges lillois ont renvoyé mercredi 5 mai en correctionnelle l’ancien Premier ministre et ancien maire de Lille, Pierre Mauroy, pour “détournement de fonds publics”. À 81 ans, il devra répondre devant la justice d’une affaire d’emploi fictif. Il lui est reproché d’avoir recruté Lyne Cohen-Solal en 1992 comme attachée de presse de l’agglomération lilloise, alors qu’elle était en même temps à Paris, rédactrice en chef du journal hebdomadaire du PS, Vendredi. En février 2006, la Cour de Cassation avait jugé que les faits n’étaient pas prescrits, rappelant qu’en matière de détournement de fonds ou d’abus de biens sociaux, la prescription de trois ans ne commence qu’à la découverte des faits.
Ce rebondissement inattendu donne un nouveau relief à l’affaire d’emploi fictif révélée par Lyon Capitale le mois dernier et qui concerne cette fois Gérard Collomb : lorsqu’il était député (1981-1988), le maire de Lyon avait bénéficié des services d’une assistante parlementaire qu’il ne rémunérait pas. Cette juriste titulaire d’un bac + 5, qui s’occupait pour le futur maire de Lyon de tout le travail législatif et parlementaire, était en effet payée à hauteur de 8000 francs bruts par mois (deux fois et demi le Smic de l’époque) comme… “animatrice en formation” par le Centre Léo Lagrange. Selon un document en notre possession, son contrat avait donné lieu à une “convention de formation professionnelle n°13 70 002 signée avec le Ministère des Affaires Sociales et de la Solidarité Nationale.” Ces faits pourraient être qualifiés de détournement de fonds publics, présumément commis par l’association Léo Lagrange, au profit de Gérard Collomb.
Lyon Capitale a réussi à retrouver cette attachée parlementaire. Elle a reconnu avoir été employée par l’association Léo Lagrange, alors qu’elle travaillait en réalité pour Gérard Collomb. Présente tous les jours à sa permanence, elle assurait le travail “parlementaire” : rédaction de questions écrites, analyse des projets de lois… Elle y côtoyait les assistants parlementaires “officiels”, qui étaient eux rémunérés sur les crédits de l’Assemblée Nationale, comme l’ancien conseiller général Lucien Durand, puis la première épouse du maire, Geneviève Collomb.
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Gérard Collomb profitait aussi de Saint-Fons
Le nom de Gérard Collomb apparaît dans l’ordonnance de renvoi du dossier de Saint-Fons, mais le maire de Lyon ne comparaîtra pas devant la justice. Il est associé à l’affaire en tant que fondateur de l’EPRA, une association dont Michel David, le cerveau de la nébuleuse, se servait pour faire passer l’argent vers son compte en banque personnel. Entendu par les enquêteurs, Gérard Collomb niera avoir été au courant de ces malversations et prétendra avoir démissionné de ses fonctions de président de l’EPRA au début des années 1990. Sa dernière activité avec cette association remonte à 1994. Au même titre que d’autres groupes politiques siégeant au conseil municipal de Lyon, les socialistes doivent rembourser plus de 416 000 francs indûment octroyés par l’équipe de Michel Noir. Gérard Collomb empruntera une partie des fonds auprès d’établissements bancaires. Il complétera en demandant de l’argent à l’EPRA. La somme a pu être réunie par Michel David par le biais de fausses factures entre un démembrement de Léo-Lagrange et l’EPRA. Le nom de Gérard Collomb est aussi associé à Saint-Fons en raison d’un emploi fictif qu’il aurait fait financer par Léo-Lagrange. En avril 2010, Lyon Capitale révélait que le maire de Lyon avait fait prendre en charge le salaire de l’une de ses assistantes parlementaires par cette association proche du Parti socialiste.
Le nom de Gérard Collomb a été évoqué lundi, au premier jour de l’audience pour “détournement de fons publics”, concernant la gestion de la municipalité socialiste de Saint-Fons. Le procès se poursuit toute la semaine devant le tribunal correctionnel de Lyon.
Dès le premier jour d’audience, et une fois la menace d’un renvoi du procès écartée, il a été question de la campagne électorale de Gérard Collomb pour la mairie de Lyon en 2001. L’ancienne responsable de l’association Léo-Lagrange de Saint-Fons a reconnu l’existence d’un prêt au profit du candidat lyonnais, ce qui renforcerait la thèse d’une gestion opaque des finances socialistes locales. Gérard Collomb et son adjoint aux Finances avaient été entendus comme témoins lors de l’instruction.
Yves Mongenot, ancien maire de Saint-Fons et l’un des quatre prévenus, s’est lui aussi présenté à la barre. Il a confirmé l’existence de ces enveloppes allouées à Léo-Lagrange mais a invoqué la bonne foi. Une partie des sommes était de fait utilisée pour développer les actions de quartiers.
Le deuxième jour d’audience sera consacré à l’examen de l’expertise demandée par Michel Denis, élu maire de Saint-Fons en 2001. Cette expertise était chargée de chiffrer les fameuses enveloppes.
Le procès d’une affaire de détournements de fonds publics s’ouvre le 30 novembre (2009) devant le tribunal correctionnel de Lyon. A Saint-Fons, petite commune de l’agglomération lyonnaise, un vaste système d’évaporation de subventions avait été mis au jour en 2001. Mais malgré huit années d’instruction, l’affaire arrive devant le tribunal avec des trous quant au rôle exact joué par l’actuel sénateur et maire de Lyon, Gérard Collomb.
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