La manifestation pour la Journée mondiale d’Al-Quds, qui traverse une fois par an les rues du centre de Berlin comme un fleuve charriant des eaux brunes, ne nous surprend que sur un point : comment se peut-il que cet événement n’ait pas été interdit depuis longtemps ? Comment peut-on expliquer que les participants puissent chaque année déverser impunément leur haine sur Israël ?
Que personne ne vienne ici nous parler de liberté d’expression et de manifestation ! Elle cesse d’être justifiée à partir du moment où l’on appelle à détruire un État et à expulser ses citoyens, juifs en l’occurence, comme cela a été le cas ces dernières années.
On en aurait presque l’impression que tel ou tel représentant des autorités sympathiserait secrètement avec les idées des manifestants, arabo-musulmans pour la plupart. […]
Pour éviter tout malentendu : On peut très bien être scandalisé par la politique d’Israël, on peut déplorer la construction de colonies que Benjamin Netanyahu vient de reprendre et les conséquences de la politique d’occupation; chacun a aussi le droit de pleurer les victimes palestiniennes de la politique israélienne.
[…] Mais même si l’on peut faire valoir tous ces arguments dans le cas de la Journée d’ Al-Quds, un fait se dresse comme un rocher au milieu de la Kurfürstendamm : l’hypocrisie de ses participants.Les manifestants, majoritairement arabo-musulmans, sont complètement indifférents au sort de leurs coreligionnaires. Il s’agit seulement pour eux de laisser libre cours à leur haine d’Israël et de l’Occident, représenté par l’État juif.
S’il en était autrement, nous aurions assisté en Allemagne chaque mois depuis des années à des manifestations de grande ampleur […]. Nous verrions des milliers de personnes protestant contre le massacre de leurs coreligionnaires en Syrie.
Nous serions témoins d’énormes défilés où l’on déplorerait les morts en Irak et où l’on pleurerait la destruction des mosquées à Mossoul. Nous verrions des marches silencieuses pour protester pacifiquement contre les assassins de la milice terroriste de l’État islamique, qui tuent principalement des musulmans.
Nous assisterions à des sit-in devant les ambassades iranienne et saoudienne, au cours desquels des centaines de militants protesteraient contre la guerre par procuration que mènent au Yémen Téhéran et Riyad.
Tant que tout cela ne sera qu’un produit de l’imagination, la protestation annuelle pour la journée d’Al-Quds demeurera l’expression d’une révoltante hypocrisie.
Jacques Schuster [commentateur en chef du journal Die Welt]
(Traduction Fdesouche)