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Le ton sec et le regard dur, le président de la République a très vivement recadré le chef d’état-major des armées (Cema), Pierre de Villiers, qui écoutait le discours du chef de l’État devant les centaines d’invités de la traditionnelle « garden-party » du défilé du 14 juillet, organisée la veille dans les jardins de l’Hôtel de Brienne.
Voici les propos du chef de l’État, qui n’a évidemment pas cité le nom du Cema, mais dans le public, consterné, tout le monde a compris le sens du message : « Il ne m’a pas échappé que ces derniers jours ont été marqués par de nombreux débats sur le sujet du budget de la Défense. Je considère, pour ma part, qu’il n’est pas digne d’étaler certains débats sur la place publique. J’ai pris des engagements. Je suis votre chef. Les engagements que je prends devant nos concitoyens et devant les armées, je sais les tenir. Et je n’ai à cet égard besoin de nulle pression et de nul commentaire. De mauvaises habitudes ont parfois été prises sur ces sujets, considérant qu’il devait en aller des armées comme il en va aujourd’hui de nombreux autres secteurs. Je le regrette. J’aime le sens du devoir. J’aime le sens de la réserve qui a tenu nos armées où elles sont aujourd’hui. Et ce que j’ai parfois du mal à considérer dans certains secteurs, je l’admets encore moins lorsqu’il s’agit des armées. »
« Avoinée », « Bourre-pif pendant la paix », « remontée de bretelles » : chacun y allait de sa formule pour qualifier ce que le président venait de dire
Perspective des 2%. On sait que le général de Villiers n’a pas manqué, ces derniers mois, de monter régulièrement et fortement au créneau pour défendre le budget des armées et garantir la perspective des 2 % du PIB pour la défense. Mercredi encore, alors qu’il était auditionné par les députés de la commission de la défense, le chef d’état-major déclarait qu’il ne se laisserait pas « baiser » par Bercy, après l’annonce par le ministre Gérald Darmanin du non-versement de 850 millions d’euros que la défense attendait pour boucler 2017. Il jugeait la trajectoire budgétaire pour cette année, « non tenable ». En privé, le Cema était encore plus direct, évoquant sa retraite, alors que son mandat à la tête des armées venait justement d’être prolongé d’un an.
Dans le public de la garden-party, où l’on croise toute la haute hiérarchie militaire et les industriels de la défense, mais aussi des représentants des unités qui défilent, dont les écoles d’officiers, ainsi que des délégations étrangères, la consternation régnait et les applaudissements n’ont guère été nourris.
« Avoinée », « Bourre-pif pendant la paix », « remontée de bretelles » : chacun y allait de sa formule pour qualifier ce que le président venait de dire. Fort de plusieurs décennies de couverture des affaires militaires, je peux personnellement témoigner n’avoir jamais rien entendu de tel, ni vécu un tel moment.
« Inélégant », « maladroit », personne ou presque dans le public n’adhérait aux propos du chef de l’État. « Ce genre de choses se dit en privé, dans un bureau, pas devant tout le monde », confessait un officier général, qui a eu à subir de tels foudres en d’autres temps. D’aucuns prenaient même les paris pour savoir si le Cema allait démissionner dès la fin du défilé de demain…
« L’effort demandé est légitime et faisable […] dans un contexte où tous les ministères sont mis à contribution », a expliqué le chef de l’État. Mais certains ministères semblent l’être plus que d’autres
Marquer une autorité. Selon une information non confirmée, les propos du chef de l’État ne figuraient pas dans le texte initial du discours et il les aurait rajoutés afin de marquer une autorité… que personne d’ailleurs ne conteste. Au risque de provoquer un sérieux malaise dans la communauté militaire, par nature attachée à ses chefs. (…)