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L’avenir du général, ancien chef d’état-major, ne se serait pas joué lors de l’audition parlementaire du 12 juillet, mais au cours d’un conseil restreint de défense qui s’est tenu le matin même à l’Élysée.

En l’espace de deux mois, les équilibres entre le pouvoir civil et les militaires ont spectaculairement évolué. Les principaux acteurs du monde de la défense sous François Hollande ont été contraints de quitter les postes où ils exerçaient des prérogatives majeures dans les domaines stratégiques, opérationnels, budgétaires et industriels. Il s’agit de Jean-Yves Le Drian, le respecté ministre de la Défense du dernier quinquennat qu’Emmanuel Macron tenait à bouter hors de son bastion, de son directeur de cabinet, le redouté Cédric Lewandowski, et du puissant délégué général pour l’armement, Laurent Collet-Billon. Celui-ci n’a pas été prolongé dans ses fonctions après neuf années aux commandes de la DGA.

La démission du général Pierre de Villiers et l’onde de choc qu’elle a provoquée s’inscrivent dans le fil de cette volonté du chef de l’État, chef des armées, de reprendre en main les rênes de la défense et d’affirmer son autorité présidentielle.

Le jeu de bascule s’apparente aussi à la «revanche de Bercy», après trois années durant lesquelles la Défense a somme toute tenu la dragée haute aux argentiers de l’État. Il n’est guère étonnant que les questions de budget aient été au cœur du maelström des dernières semaines. À deux jours de la Fête nationale, «Bercy a joué ses cartes à toute vitesse, pour faire passer ce qui n’aurait pas été possible sous Le Drian», raconte une source gouvernementale. Un haut fonctionnaire a joué un rôle clé dans l’ombre du chef de l’État: celui qui fut son directeur de cabinet lorsqu’il était ministre des Finances, Alexis Kohler, actuellement secrétaire général de l’Élysée.

Une bonne source raconte ainsi comment se serait «noué le sort» du général de Villiers, ce 12 juillet au matin. Non pas lors de l’audition parlementaire à huis clos, tant commentée, qui se déroule en fin de matinée et à l’issue de laquelle le chef d’état-major des armées (CEMA) a fait part de son exaspération en des termes plutôt crus. Mais un peu plus tôt, lors du conseil restreint de défense qui se tient à 9 heures à l’Élysée. La veille, Gérald Darmanin, le ministre de l’Action et des Comptes publics, a évoqué les économies à réaliser dans une interview au Parisien , que nombreux au gouvernement, Défense en tête, jugent intempestive. Parce qu’il faut trouver 4,5 milliards d’euros au second semestre et qu’on veut baisser les prélèvements, il faut «taper tout de suite» dans le budget de l’État.

Lors de la réunion à l’Élysée, le premier ministre, Édouard Philippe, confirme la réduction de 850 millions d’euros imputée au budget de la Défense en 2017. La ministre des Armées, Florence Parly, exprime alors son désaccord, soutenue par Jean-Yves Le Drian, le nouveau patron du Quai d’Orsay. Enfin, le général de Villiers prend lui aussi la parole. «Alexis Kohler en a été extrêmement mécontent», indique une bonne source. Aucune déclaration n’a filtré de ce conseil restreint couvert par le secret de la défense nationale. Il n’en ira pas de même lors de la commission parlementaire, quelques heures plus tard, d’où «fuite» la colère du CEMA. Un enchaînement d’événements retentissants est enclenché.

«Ce qui a déplu à Alexis Kohler, c’est l’idée qu’on puisse imaginer revenir sur un arbitrage du président de la République en organisant la pression. On n’est plus sous Hollande», souligne une source proche de l’affaire. «Ce qui l’a excédé, c’est la contestation de l’autorité. L’argument selon lequel le CEMA aurait contrevenu au devoir de réserve (évoqué par Emmanuel Macron dans son discours à l’Hôtel de Brienne, NDLR) ne tient pas. Faire passer cette affaire pour une histoire de discipline, c’est de l’habillage médiatique», estime cette source. Selon celle-ci, la «fuite» des propos du CEMA devant les parlementaires a été «exploitée pour en faire une démonstration d’autorité». Le message aux 220 directeurs d’administration centrale et principaux responsables de l’administration est clair: «Attention, seuls les plus loyaux resteront.» (…)

Le général Puga, qui aurait l’oreille d’Emmanuel Macron, plaidait pour un CEMA ayant du temps devant lui et dont l’exercice coïnciderait avec la durée du quinquennat. Telles sont les perspectives du général François Lecointre, 55 ans, nommé le 20 juillet pour remplacer le général de Villiers. Sur le fond, rien n’est réglé. Le nouveau CEMA hérite d’une situation compliquée. D’après un de ses pairs de Balard, «ce ne sera guère évident pour lui de recomposer tous les morceaux qui ont été éparpillés façon puzzle».

Le Figaro

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