Les agressions sexuelles font l’effet d’une bombe à fragmentation sur les victimes. Rien d’étonnant qu’elles mettent parfois des années à en parler. Quatre ans pour cet Héraultais qui n’avait pas plus de 10 ans lorsqu’il a subi les gestes d’un adulte sans en comprendre la portée. “Un cas d’école”, selon son avocat Me David Chaigneau, lors du procès, ce mercredi 30 août, au tribunal correctionnel.
Mais ce lourd secret a fini par être trop pesant pour l’adolescent. Rongé par les cauchemars, la culpabilité et aujourd’hui toujours en proie au syndrome de stress post-traumatique. En 2014, il s’est d’abord confié à un copain de classe, puis à un surveillant, à l’infirmière, à l’assistante de vie scolaire et, seulement après, à sa mère. Une enseignante de français qui donnait des cours, cet été 2010, à des Afghans ayant fui la guerre, hébergés par une association dans un petit village de l’arrière-pays. Dans ce cadre rural, les repas étaient partagés entre les bénévoles et les demandeurs d’asile.
“Trop proche des mineurs”
Parmi eux, un jeune homme de 22 ans. Il est arrivé un an plus tôt à Calais, fuyant les représailles des talibans dont son frère était proche. C’est cet ancien agriculteur à la personnalité “clairement limitée”, selon les termes de son défenseur Remire Hedidi, que la victime désigne formellement sur planche photo aux enquêteurs comme celui qui l’a abusée. En saisissant sa main pour le masturber dans une chambre de l’appartement où logeaient les migrants. Puis le lendemain, sous prétexte de se rendre à la rivière toute proche, en lui imposant une relation sexuelle.
À la barre, le mis en cause répète, comme au juge instructeur, qu’il ne comprend pas ce qu’on lui reproche, via son interprète. Il confirme seulement avoir joué avec l’enfant. “Des amis afghans vous avaient déjà averti que vous étiez trop proche des mineurs”, fait remarquer le président du tribunal, Sébastien Colombet. “Oui, on m’avait dit de ne pas rester trop avec les enfants, sinon “tu auras des problèmes””, acquiesce-t-il.
“Il est dans l’incapacité absolue de reconnaître des faits pourtant parfaitement établis”, considère Me David Chaigneau, en s’appuyant sur les analyses des experts psychiatres qui notent chez le prévenu “un tabou culturel par rapport à la sexualité”, associée “au mal, à Satan”, le poussant ainsi au déni.
Faute d’éléments matériels, pour la défense, il s’agit d’une parole contre une autre. “être proche des enfants n’a rien de sexuel, c’est être dans leur monde”, plaide Remire Hedidi, qui refuse de placer son client dans la catégorie des “dangereux prédateurs”.
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Merci à Oglio