Faut-il rendre gratuits les transports en commun ? Ce débat, rallumé au début des années 2000 par le RATP (Réseau pour l’abolition des transports payants), revient sur le devant de la scène. Après Niort, en septembre, ce sera au tour de Dunkerque de rejoindre l’an prochain la vingtaine d’agglomérations qui ont fait le choix de rendre gratuits leurs transports publics. Le sujet divise.
« Nous aurions pu choisir de mettre en place une tarification solidaire, où chacun paie son ticket en fonction de ses revenus. Mais il n’y aurait pas eu de choc psychologique. Avec la gratuité, je pousse les habitants dans un bus. »
Une première place que Niort ne va occuper qu’un an, puisque Dunkerque (Nord) et son agglomération de 200 000 personnes ont prévu d’étendre la gratuité, déjà effective le week-end depuis 2015, tous les jours à partir de septembre 2018. «Nous voulions une vraie révolution dans les transports, justifie son maire (divers gauche), Patrice Vergriete. Non seulement on redistribue du pouvoir d’achat mais on gomme des inégalités pour accéder plus facilement à l’emploi, aux loisirs. On crée du lien social et il y a un impact écologique.»
Accrochée aux côtes de la mer du Nord, la ville, détruite pendant la Seconde Guerre mondiale, a été rebâtie pour que la voiture règne sans partage. «Seulement 4,7 % des déplacements de l’agglomération se font en transports en commun, regrette l’édile. Quand la moyenne pour une collectivité comme la nôtre oscille entre 10 % et 13 %.» Une désaffection qui a un coût. «Chaque jour, 400 000 litres de carburant sont utilisés. Soit une facture quotidienne de 500 000 €», poursuit Patrice Vergriete. Dès lors, la gratuité des transports en commun s’est imposée comme une évidence. […]
Jean-Pierre Farandou, président de Keolis
L’opérateur de transports publics Keolis, filiale de la SNCF, qui gère 240 km de métro, 797 km de tramway, 6 000 km de train et 23 500 bus dans le monde. Plutôt que la gratuité, il milite pour une tarification adaptée aux revenus des usagers.
Faut-il instaurer la gratuité dans les transports ?
Jean-Pierre Farandou. C’est une fausse bonne idée. La gratuité signifie que ce qui est normalement supporté par l’usager l’est par le contribuable. Ça peut avoir des effets pervers sur le respect des équipements et des personnels. […]
Comment ça se passe à l’étranger ?
Keolis est présent dans plusieurs pays européens et aucun ne pratique la gratuité. La France fait partie des pays où les prix sont les plus bas. Un ticket de métro coûte moins de 2 € à Paris, contre 4 € environ à Londres. Par rapport à d’autres services publics en France comme la cantine ou les déchets, les transports sont les seuls dont le prix a légèrement baissé en euros constants depuis années. Ce n’est donc pas le moment d’élargir la gratuité. Au contraire, aujourd’hui, l’usager paie 30 % et le contribuable 70 %. Il faudrait du 50-50.