Ils se revendiquent tous les deux de la laïcité à la française. Et pourtant leurs combats sont diamétralement opposés. Lydia Guirous, issue d’une famille musulmane et aujourd’hui proche de Laurent Wauquiez, défend la notion de racines chrétiennes de la France; Christian Eyschenn, vice-président de la Fédération nationale de la libre pensée, estime que la principale menace à la laïcité à la française est l’emprise, toujours réelle, de la religion catholique.
De votre point de vue, où en est la laïcité aujourd’hui en France ?
Lydia Guirous : Elle est menacée partout, à l’école, dans les administrations, dans les universités, dans les entreprises et plus généralement dans l’espace public. Aujourd’hui, le sujet est de savoir si le seul véhicule juridique de la laïcité [la loi de séparation de l’Etat et de l’Eglise de 1905, NDLR] est suffisant face aux assauts de l’islamisme. A mon sens, il faut le renforcer en ciblant clairement la lutte contre l’islamisme.
Pour ce faire, il faut naturellement renforcer la loi de 1905, comme l’a fait la loi de 2004 en étendant le champ de la neutralité aux entreprises et aux universités. Mais il faut multiplier également d’autres dispositifs législatifs en les appuyant sur d’autres supports juridiques que la laïcité, comme la sécurité (cf. la loi anti-burqa de 2010) ou l’égalité hommes-femmes.
Si cela ne suffit pas, et surtout si des blocages juridiques sont rencontrés, il faudra alors inscrire clairement les racines chrétiennes de la France dans la Constitution, car la lutte contre le péril islamiste et le communautarisme qu’elle génère doit être notre seule priorité pour préserver notre démocratie. […]
De votre point de vue, où en est la laïcité aujourd’hui en France ?
Christian Eyschen : La laïcité est bien installée dans nos institutions. Il n’y a aucune menace à la mesure de ce que la France a connu entre 1940 et 1944, quand le gouvernement de Vichy a détricoté la loi de 1905 et remis en cause la séparation de l’Eglise et de l’Etat. On constate une très grande sécularisation de la société. A la Fédération nationale de la libre pensée, on ne pense pas que le culte musulman constitue une menace. On voit plutôt la menace du côté de l’Europe “vaticane” qui pourrait être tentée d’inscrire dans ses textes les racines chrétiennes de l’Europe. A ce moment-là, le principe de subsidiarité s’imposerait à la France. […]