Le ministre de l’Intérieur doit signer sous peu une circulaire relative à ce recensement prévu dans les centres d’hébergement d’urgence. Les associations, elles, craignent une logique «d’étiquetage et de triage» des publics accueillis.
«Plus personne dans les rues d’ici fin 2017.» Telle est la promesse formulée en juillet dernier par Emmanuel Macron. Pourtant, la fin d’année approche et migrants, sans-abri ou clandestins errent encore et toujours dans les rues, à Paris ou ailleurs. Les centres d’hébergements d’urgence – souvent des hôtels et des foyers – sont bien souvent saturés et les associations qui les gèrent débordées. Pour tenter de désengorger le dispositif, le gouvernement prévoit, dans les prochains jours, la publication d’une circulaire sur le recensement des étrangers qui se trouvent actuellemnt dans ces centres. Des «équipes mobiles» y seront envoyées afin de recueillir des informations sur la situation administrative des personnes hébergées. L’objectif de l’exécutif: savoir précisément qui est accueilli dans ces lieux, rediriger dans d’autres structures les publics qui ne doivent pas s’y trouver afin de libérer des places pour les sans-abri. Et remplir l’objectif fixé par le président en juillet.(…)
Patrick Doutreligne, président de l’union d’associations sanitaires et sociales (Uniopss) a immédiatement dénoncé une logique de «de recensement, d’étiquetage et de triage» lancée par l’exécutif. Contacté par Le Figaro, Bruno Morel, directeur général d’Emmaüs Solidarités tire la sonnette d’alarme: «On touche à notre ADN qui est l’hébergement inconditionnel des personnes.» En effet, l’article L.345-2-2 du code de l’action sociale et des familles stipule que «toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique et sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d’hébergement d’urgence».
Préoccupée par la situation, le conseil de Paris a adopté mardi un vœu demandant à l’État de «rendre publiques» les informations concernant la circulaire, ainsi que ses «conséquences» pour les migrants hébergés. Elle a également interpellé l’État «sur la nécessité de respecter les règles relatives à l’éthique du travail social». «C’est un coup de tonnerre. On ne peut pas demander aux associations à la fois d’accueillir leur prochain, de le soigner et en même temps de participer à une mission régalienne», déplore Dominique Versini, adjointe PS d’Anne Hidalgo en charge de la solidarité, jointe par le Figaro. «Un débat qui remettait en cause l’accueil des sans-papiers dans les centres d’urgence avait déjà été ouvert en 2007 à l’occasion du projet de loi sur l’immigration de Brice Hortefeux. Après de longues discussions à l’Assemblée, cette mesure avait été abandonnée et avait finalement abouti sur la loi de 2009, sanctuarisant l’hébergement inconditionnel», rappelle-t-elle.(…)
Avec cette nouvelle circulaire, les associations craignent également que l’État ne leur demande d’établir des listes sur les personnes qu’elles hébergent. C’est ce qu’a fait le préfet de Haute-Savoie, Pierre Lambert, dans un courrier daté du 14 novembre 2017. Le magistrat a réclamé à l’ensemble des organismes sociaux de transmettre, chaque mois, l’identité, la composition familiale et la date de naissance des publics accueillis dans leurs centres. Et si leur titre de séjour est expiré, l’exécutif «envisage de les assigner à résidence» peut-on lire dans ce courrier.
«Les travailleurs sociaux ne feront pas un travail de police», prévient Pierre Henry, directeur général de France terre d’asile, au Figaro. «La priorité c’est que chacun puisse être reçu dans la dignité. Dans les centres d’hébergements d’urgence de droit commun, on trouve parfois des milliers de familles qui habitent à l’hôtel depuis plusieurs années. On fait quoi, on les met dans un avion et on fait un renvoi collectif? Je crois que l’État fait preuve d’une grande méconnaissance du fonctionnement de notre travail quotidien», lâche-t-il.
Malgré le mécontentement des associations, la circulaire devrait bien être publiée dans les prochains jours. (…)
Merci à valdorf