La première rencontre entre le président de la République et les responsables des cultes en France s’est déroulée le 21 décembre. Sur quelle ligne avec quels enjeux ? L’essayiste Édouard Tétreau proche du Président et relais informel entre l’exécutif et le monde catholique, fait le point sur la laïcité d’Emmanuel Macron dans un entretien.
[…]Emmanuel Macron estime-t-il que toutes les religions se valent aux yeux de la République ? Le catholicisme doit-il bénéficier d’un régime à part eu égard à son antériorité ?
Je ne suis ni son porte-parole, ni son exégète sur les questions religieuses. Le président de la République se doit de traiter les religions de façon absolument égale et impartiale : Emmanuel Macron le fait au moins autant que ses prédécesseurs. J’observe simplement que son histoire personnelle est celle d’une rencontre avec la foi chrétienne et l’Église – il a choisi, à 12 ans, d’être baptisé.
Il a sans doute, de ce fait, l’expérience d’une caractéristique essentielle du christianisme par rapport aux autres religions : à savoir que c’est une religion de la liberté. Vous devenez chrétien, non par le sang ou l’ethnie mais par le baptême et sa confirmation. Et vous êtes libres de quitter cette religion, sans que l’on vous condamne à mort pour apostasie, ou que l’on vous mette au ban de la communauté. Dans le christianisme, la porte est toujours ouverte pour ceux qui veulent entrer ou sortir.
Le christianisme est non seulement la religion de la liberté, mais aussi celle qui a toujours eu l’initiative du dialogue avec les autres religions. Est-ce que cela confère à l’Église de France un privilège ? Je crois exactement l’inverse : parce que l’Église est depuis des siècles l’interlocuteur principal, sine qua non de l’État français, elle a le devoir de faciliter la coexistence harmonieuse et pacifique de toutes les sensibilités en France, croyants comme non-croyants.
Le prédécesseur d’Emmanuel Macron, pourtant si hostile à la communauté catholique, l’avait d’ailleurs reconnu, quoique tardivement :
sans l’attitude exemplaire de l’Église de France après l’assassinat du père Hamel à Saint-Étienne du Rouvray (appels au calme et à la paix), le pays aurait basculé dans la violence civile.
Pour résumer, peut-être d’une façon trop lapidaire : sans les catholiques, et sans l’esprit de paix et de fraternité des catholiques, l’unité du pays et la concorde sociale sont des chimères. Je crois qu’Emmanuel Macron le sait, et l’a dit à Saint Étienne du Rouvray. Il lui reste à poser les actes et les gestes pour mettre les catholiques au cœur d’un effort historique de réconciliation nationale.