«Pourquoi un penseur que tout classe à gauche est-il considéré comme de droite ?»: voilà la question de fond que posent Emmanuel et Mathias Roux dans leur livre “Michéa l’inactuel, une critique de la civilisation libérale”. Une question essentielle car Jean-Claude Michéa, agrégé de philosophie, est l’un des rares théoriciens contemporains à être déjà culte de son vivant.
«La gauche intellectuelle lui fait payer le fait d’être lu, mentionné et revendiqué par une certaine droite» écrivent les auteurs. Par le fait qu’il soit goûté aussi bien dans les rangs de la gauche conservatrice que de la droite illibérale, Michéa est aussi un magnifique révélateur des sectarismes contemporains.
On ne le voit jamais sur les plateaux télé, et, depuis sa retraite des Landes, il n’accorde que de rares entretiens à la presse écrite. Pourtant, l’auteur de “L’Empire du moindre mal” a servi de guide à toute une génération lassé par les incohérences de chaque camp politique et déçus par les fausses promesses de l’ «alternance unique». […
[…]«Quand donc la tyrannie du politiquement correct en vient à se retourner contre la tyrannie du plaisir, on assiste au spectacle étrange de mai 68 portant plainte contre mai 68, du parti des conséquences mobilisant ses ligues de vertu pour exiger l’interdiction de ses propres prémisses». Un aphorisme qui pourrait définir à merveille les ambiguïtés du mouvement «me too».
Depuis les années 2000 (et la publication du Rappel à l’ordre de Daniel Lindenberg) , la gauche se livre à une épuration systématique dans ses rangs de toute pensée jugée conservatrice.
Quiconque n’adhère pas sans fard à l’idéologie progressiste se voit retirer l’onction divine et ne mérite plus d’appartenir à la tribu.