MàJ 17/02/2018
Parmi les nombreuses réactions à l’article sur les réseaux sociaux, le fil twitter d’un internaute passe au crible les sources de l’article.
Décortiquage des sources employées par l’article de Numerama sur Kingdom Come Deliverance, à dérouler
tl;dr l’argumentation historique du gars, c’est évidemment du flan https://t.co/Dp6HVZdyoy— Pierric Merlin ✌🏻 (@MyrddinRic) 17 février 2018
Son fantasme de marchands arabes qui se seraient pointés jusqu’en Europe centrale faire leur marché, et qui auraient amené des esclaves noirs on ne sait trop pourquoi est du + haut ridicule. Pour faire illusion il met en lien une source qui bien évidemment ne dit rien de tout ça/
— Pierric Merlin ✌🏻 (@MyrddinRic) 17 février 2018
mais que Prague était au 10/11e un centre de traite d’esclaves slaves à destination des pays musulmans, exportés par des marchands Vénitiens ou Juifs.
Mais écrire un gros mensonge en lien hypertexte vers un ouvrage historique va bien pour en foutre plein la vue aux gogos /— Pierric Merlin ✌🏻 (@MyrddinRic) 17 février 2018
La source dont Numerama fait dire ce qu’elle ne dit pas sur Prague
qui se contenteront de jeter un oeil sans prendre le temps de lire. Voire ne cliqueront même pas sur le lien et goberont toutes crues les salades d’olbius, par connerie +ou- volontaire selon le degré d’adhésion préalable à la mythologie SJW /
— Pierric Merlin ✌🏻 (@MyrddinRic) 17 février 2018
Idem pour “l’historienne” qui “s’est penchée” sur le sujet et lui a livré le fruit de “ses recherches”. Le type nous enrobe le truc façon j’ai contacté une chercheuse en histoire experte du sujet. En tout et pour tout c’est une de ses followers qui se trouve être prof en lycée /
— Pierric Merlin ✌🏻 (@MyrddinRic) 17 février 2018
et lui a dégoté un lien vers un article du site https://t.co/5tWbFqcE4F. On ne trouve de cette fille aucun travail de recherche autre que ce qui doit probablement lui servir à l’écriture de fantasy coquine, seules publications qu’on trouve sous son nom, mais bref: l’article est /
— Pierric Merlin ✌🏻 (@MyrddinRic) 17 février 2018
sérieux, mais à l’instar de Dénes Harai (vrai historien chercheur, lui, qui est utilisé comme caution et dont on se demande ce qu’il aurait à dire sur les autres thèses de l’article), ne corrobore que la présence de Tziganes en Europe centrale au Moyen-Age. Le scoop, quoi. /
— Pierric Merlin ✌🏻 (@MyrddinRic) 17 février 2018
Existence de Tziganes dans ces régions qui n’implique absolument pas qu’il y en ait forcément eu une communauté pile-poil dans le petit territoire couvert par le jeu. (D’ailleurs le jeu eut-il représenté 1 ou des personnages Tziganes,que le plan de bataille SJW se serait reporté/
— Pierric Merlin ✌🏻 (@MyrddinRic) 17 février 2018
sur la qualité de cette représentation, obligatoirement positive et “empowering”, pas question de les montrer comme les marginaux fonctionnant en communautés endogames souvent en indélicatesse avec les lois et la morale du pays qu’ils sont encore aujourd’hui, donc à l’époque..) /
— Pierric Merlin ✌🏻 (@MyrddinRic) 17 février 2018
Quant aux personnes noires et autres marchands arabes qu’il était “tout à fait possible de croiser” dans le territoire du jeu selon notre olibrius, remarquez bien qu’il ne peut se réclamer sur ce point ni du spécialiste Dénes Harai, ni d’un article d’hérodote, et pour cause /
— Pierric Merlin ✌🏻 (@MyrddinRic) 17 février 2018
aucun historien sérieux n’apporterait son crédit à ce qui ne sont que de fumeuses spéculations basées sur une vision de l’Histoire fantasmée et anachronique. Le zigue est donc obligé de s’en référer à des gens que la spéculation délirante ne fait pas reculer,et qui se basant sur/
— Pierric Merlin ✌🏻 (@MyrddinRic) 17 février 2018
une iconographie médiévale montrant des Noirs dans des scènes bibliques, ou de batailles de croisades, en déduisent qu’il y avait des Noirs en Europe. Ce n’est ni plus ni moins ce sur quoi repose toutes les thèses de medievalpoc “blogueur spécialiste d’Histoire médiévale” /
— Pierric Merlin ✌🏻 (@MyrddinRic) 17 février 2018
dont l’article en lien, à mille lieues de “déconstruire point par point” quoi que ce soit, ne fait que poster quelques illustrations de personnages bibliques ou saints Egyptiens représentés avec une peau noire par les Bohémiens de l’époque. Ce qui prouve a contrario une chose : /
— Pierric Merlin ✌🏻 (@MyrddinRic) 17 février 2018
Les illustrateurs européens de l’époque avaient tellement une idée vague de ce à quoi pouvait ressembler un Egyptien comme St Maurice d’Agaune et autres moyen-orientaux, que pour eux c’étaient des Noirs. On voit bien toute la fréquence des contacts entre ces populations, là /
— Pierric Merlin ✌🏻 (@MyrddinRic) 17 février 2018
Le livre “Germany and the Black Diaspora 1250-1914” dégoté dans google books (“d’après nos propres recherches”, c’est ça), émane lui bien d’historiens, mais se livre sur les chapitres qui concernent le moyen-âge à pareilles spéculations assez stupéfiantes de vide. Pics related / pic.twitter.com/HmE6rREeKE
— Pierric Merlin ✌🏻 (@MyrddinRic) 17 février 2018
L’historien (de l’Art) Paul H.D Kaplan adopte la mm “méthodologie” ahurissante que medievalpoc, et émet quantité d’hypothèses invérifiables et de suppositions pour habiller sa conviction très personnelle qu’il y avait une population noire dans les pays allemands à la Renaissance/
— Pierric Merlin ✌🏻 (@MyrddinRic) 17 février 2018
Bien qu’il soit obligé à chaque fois (contrairement à medievalpoc qui ne s’embarasse pas de pareils scrupules) qu’il avance ses interprétations de préciser “ce n’est pas documenté” “il n’y a pas de preuve” “j’ai supposé que”. Un travail d’une grande faiblesse scientifique /
— Pierric Merlin ✌🏻 (@MyrddinRic) 17 février 2018
et dont il n’est même pas sûr que le collaborateur de Numerama ait réellement pris connaissance, se contentant sans doute de mettre en lien pour donner un peu de poids à tout le vide sur lequel repose sa version très particulière, anachronique et fantasmée, de l’Histoire. Fin.
— Pierric Merlin ✌🏻 (@MyrddinRic) 17 février 2018
Au passage, je ne pense pas qu’elle-même se prétende plus que ce qu’elle n’est, c’est l’auteur de l’article qui tourne de façon à laisser penser qu’il s’agit d’une chercheuse spécialiste du sujet. Pas sûr qu’elle soit à l’aise avec la façon dont il la vend, d’ailleurs
— Pierric Merlin ✌🏻 (@MyrddinRic) 17 février 2018
15/02/2018
L’absence de personnes non-blanches dans le jeu de rôle Kingdom Come Deliverance a engendré une vive polémique. Daniel Vávra, le directeur créatif, n’a pas hésité à invoquer des raisons historiques pour justifier son choix. Quitte à manipuler l’Histoire ?
Tout avait pourtant bien commencé
Au départ, c’était une jolie success story dans le monde du financement participatif. Ne trouvant pas d’éditeur pour son projet de jeu de rôle médiéval, le studio Warhorse tente sa chance sur Kickstarter en janvier 2014. L’argumentaire est simple : les développeurs veulent placer la rigueur historique au cœur de leur processus créatif. Le soutien du public ne se fait pas attendre : plus d’1,3 million d’euros sont réunis durant la campagne. Fort de ce succès, Warhorse parvient à convaincre des investisseurs de la solidité du projet et signe un accord avec l’éditeur Deep Silver en 2016, qui distribuera les versions physiques du jeu sur consoles et PC.
Après plusieurs années de travail, les équipes de Warhorse sortent la version finale de Kingdom Come Deliverance le 13 février 2018. L’événement fait resurgir une polémique datant d’il y a deux ans, dont peu de médias francophones se sont fait l’écho. (…)
Une idéologie sous couvert de réalité historique
Pour bien comprendre à qui l’on a affaire, il est nécessaire de dresser un portrait rapide du fondateur : Daniel Vávra, directeur créatif de Kingdom Come Deliverance est un fervent défenseur du GamerGate. Ce mouvement réactionnaire a été lancé en 2014 afin, entre autres, de lutter contre la politisation grandissante des jeux vidéo et plus généralement, pour allier des joueurs dans la lutte contre la représentation de toutes les minorités et l’inclusion, notamment des femmes, dans le jeu vidéo. La couverture du GamerGate, devenue une rengaine, disait que ces joueurs luttaient contre la corruption des journalistes dans le jeu vidéo. Ce mouvement n’est pas étranger au renforcement de l’extrême droite américaine et des médias associés (Breitbart en tête).
Le blogueur spécialiste d’Histoire médiévale Medievalpoc estime que l’absence de personnages de couleur dans Kingdom Come est avant tout un choix des développeurs, car la vérité historique n’est pas aussi claire que ce que laisse entendre Vávra. Ainsi, appuyé par de nombreuses sources picturales et littéraires, le blogueur déconstruit point par point les fondements supposément historiques à l’absence d’individus noirs dans le jeu. Victime de cyberharcèlement depuis cet article, Medievalpoc reçoit encore régulièrement des menaces de mort à cause de ses déclarations — ce qui donne un tableau peu reluisant de la communauté derrière le titre de Warhorse.
Contactée par nos soins, l’historienne Marie-Anne Cleden s’est penchée sur la présence de populations non-blanches dans la Bohème de 1402. D’après ses recherches, il s’avère que des Roms vivaient aussi sur ce territoire. Dénes Harai, spécialiste de l’Europe Centrale à l’université de Pau, nous a par ailleurs confirmé la présence de Tziganes. Enfin, d’après nos propres recherches, il était tout à fait possible, bien que rare, de croiser une personne noire ou un marchand d’esclaves arabe entre Sázava et Rataje nad Sázavou, à l’aube du XVe siècle. Ne pas représenter ces populations est donc un choix qui n’est en aucun cas fondé sur un consensus historique, comme le prétend pourtant Daniel Vávra. (…)
(Merci à brnobro)