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Les enfants de Johnny trouvent normal de recevoir un patrimoine qu’ils ne doivent ni à leur travail, ni à leur talent. Pourquoi ne pas supprimer l’héritage et le remplacer par un système plus juste s’interroge le journaliste Arnaud Gonzague ?

Pourquoi le fils/la fille d’un personnage qui amassé une fortune, petite ou grande, considère-t-il comme un dû de la recevoir à sa mort, à peine allégée d’une taxation ? Autrement dit (toujours pour paraphraser Montesquieu), comment peut-on être un héritier ? […]

Il ne s’agit pas ici de juger des personnes, mais d’interroger cette drôle d’évidence à laquelle notre société ne songe plus à s’attaquer – alors que, par le passé, elle a indigné bien des penseurs : les saint-simoniens, Karl Marx (qui pourtant, a longtemps bataillé contre sa mère pour récupérer l’héritage paternel !), Mikhaïl Bakounine, John Maynard Keynes, Léon Blum… Tous considéraient que l’héritage filial devait être, au minimum, limité, au maximum aboli, comme un privilège dépassé, indéfendable. […]

On sait depuis Bourdieu que la reproduction sociale n’est pas seulement une histoire de comptes en banque et de biens immobiliers : les plus fortunés transmettent, en plus, à leurs descendants une culture, une éducation, un réseau de pairs ou ce qu’on appelle simplement l’”assurance des gens bien nés”.

Contre cette injuste répartition des atouts socioculturels, l’Etat démocratique a mis en place un système, certes très imparfait, très inabouti, mais qui va dans le bon sens, et qu’on appelle l’école de la République.

S’il fallait supprimer l’héritage filial, par quel mécanisme plus équitable pourrait-on le remplacer ? Car il n’est évidemment pas question de laisser l’Etat empocher tous les biens des citoyens une fois leurs cercueils refermés. On le sait, l’héritage est souvent regardé comme un moyen de redistribuer les richesses vers une jeune génération fréquemment en butte au chômage de masse, à la précarité et à une accession de plus en plus difficile à la propriété. Ce rôle doit se poursuivre, mais en y ajoutant une élémentaire justice sociale.

Par exemple, on pourrait imaginer que tous les biens des défunts alimenteraient un fonds qui serait reversé sous forme d’un revenu destiné à la jeunesse. Une sorte de revenu universel d’un montant restant à déterminer, qui serait touché chaque mois par tous les 18-30 ans. Ce coup de pouce arriverait dans un moment de leur vie où leur situation matérielle est souvent objectivement difficile – et non, aléatoirement, après le décès du dernier de leurs parents, comme c’est le cas aujourd’hui. […]

Nouvel Obs

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