La campagne présidentielle de Jean-Luc Mélenchon a-t-elle donné lieu à des surfacturations au profit de structures proches des insoumis ? Une société a largement bénéficié de cette période : Mediascop, propriété de Sophia Chikirou, sa directrice de la communication.
Mediascop est une agence de communication habituée des campagnes de Jean-Luc Mélenchon. Et pour cause, l’entreprise a été créée en juillet 2011 dans la perspective de la présidentielle 2012. Elle est fondée sous forme de société coopérative par Arnauld Champremier-Trigano, Alban Fischer, deux anciens journalistes passés dans la com’, et Sophia Chikirou. Ils sont à l’époque les trois stratèges de la communication de Jean-Luc Mélenchon. Mediascop prend en charge tout le volet communication de la campagne 2012 : attachés de presse, conseils, site internet, réalisation de clips… Elle facture au total 705 000 € à l’association de financement qui représentent la quasi-totalité de son chiffre d’affaires jusqu’en 2013. A l’époque, la Commission de contrôle des comptes de campagne (CNCCFP) ne trouve rien à redire sur les factures de la société qui annonce une marge de 10 % sur ses documents.
Les mois qui suivent la présidentielle sont compliqués pour Mediascop, dont les créateurs réalisent même une web-série pour illustrer leurs difficultés à se relancer. Le chiffre d’affaires s’effondre, malgré quelques prestations sur les législatives et une mission de communication pour Jerôme Kerviel (à titre gratuit, nous a assuré l’un des fondateurs). En septembre 2013, Arnauld Champremier-Trigano et Alban Fischer lancent leur propre agence de communication et cèdent leurs parts dans Mediascop à Sophia Chikirou qui reste seule propriétaire d’une société somnolente. Plus de locaux, plus de clients, Mediascop ne réalise aucun chiffre d’affaires en 2015. La campagne présidentielle qui se profile va lui donner l’occasion de se relancer de manière exceptionnelle. […]
Le choix de confier à Mediascop plus de 11 % du budget total de la campagne interroge pourtant. Pourquoi choisir une entreprise qui n’a plus d’activité depuis des mois, pas de salariés, et encore moins de locaux ? Pourquoi ne pas avoir salarié directement, par l’association de campagne, l’équipe communication comme l’ont fait la majorité des autres candidats à l’Elysée ?
La réponse est peut-être dans les livres de la société de Sophia Chikirou. Mediascop est une société incroyablement rentable si l’on en croit les comptes qu’elle a déposé pour l’année 2016 (comprenant donc les premières prestations réalisées lors de la campagne présidentielle). Pour un chiffre d’affaires de 162 899 €, elle réalise un bénéfice net (après impôts) de 76 550 €, soit 47 % de marge nette ! Un ratio exceptionnel, qui s’explique notamment par la faiblesse de la masse salariale (environ 24 000 € pour 2016), mais aussi de ses charges. D’après nos informations, le personnel mis à disposition par Mediascop travaillait au troisième étage du 43, rue de Dunkerque, au siège de campagne de Jean-Luc Mélenchon. Un ancien membre de l’équipe nous a raconté qu’il était impossible de savoir qui travaillait pour Mediascop, “tout le monde était mélangé”. Pas de locaux propres donc, et peu de matériel apparemment, Mediascop ayant refacturé à l’association de financement de la campagne la location d’ordinateurs et de bancs de montage. La société semble aussi avoir eu recours au paiement de certains salariés en honoraires d’auto-entrepreneurs, plutôt qu’en salaire, système nettement plus avantageux du point de vue des cotisations sociales. […]