Depuis quelques années, de nombreux incidents indiquent une islamisation croissante du pays : politique privilégiant l’ethnie musulmane malaise, enlèvements inexpliqués, justice bâclée… Les minorités chinoises et indiennes, ou encore les populations indigènes de Sabah et Sarawak de Bornéo, en majorité chrétiennes, demandent de mieux faire respecter leurs droits et la liberté religieuse.
« Êtes-vous musulman ? » Chaque jour, quelque part en Malaisie, un officier pose la même question aux demandeurs de carte identité. Une question qui reflète à quel point l’islamisation de la Malaisie multiculturelle, pourtant fondée sur des principes séculiers, est accomplie. Ce n’est plus un secret : les services civils malaisiens, depuis l’indépendance de la Malaisie en 1957, se sont islamisés peu à peu. L’administration malaisienne, largement dominée par l’ethnie musulmane malaise, a joué un rôle majeur dans cette évolution. Aujourd’hui, les Malaisiens subissent les conséquences de cette ingérence des questions religieuses dans la politique administrative malaisienne. Les minorités chinoises et indiennes, ainsi que les populations indigènes des états de Sabah et Sarawak, à Bornéo, en majorité chrétiennes, sont de plus inquiètes face à l’islamisation du pays.
En 2007, le gouvernement a déclaré que le mot « Allah » ne pouvait être utilisé que par les musulmans, interdisant les traductions en Malaisien des écrits chrétiens contenant ce mot, y compris la Bible. Toujours en 2007, l’interdiction de la construction d’une statue taoïste dans l’état de Sabah et la destruction de temples hindous par les autorités locales, n’ont fait qu’enflammer davantage les tensions interethniques. Durant les années qui ont suivi, le gouvernement a laissé s’installer le conservatisme islamique. Les politiques islamiques ont gagné encore plus du terrain suite aux élections nationales de 2013, perdues par la coalition au pouvoir, qui avait alors réalisé sa pire performance électorale. Les droits des minorités ont subi de plein fouet cette tendance. En 2014, le chef de la police a refusé de respecter une décision de justice, lors d’une affaire concernant la garde d’un enfant. Les autorités islamiques se sont précipitées pour défendre sa position. Mais une telle opposition contre une institution d’état a posé la question de l’impartialité de l’application de la loi en Malaisie. Le chef de la police a prétendu qu’il avait pris cette décision à cause d’un conflit juridictionnel entre les tribunaux civils et islamiques. Autre fait troublant, les autorités sont toujours incapables d’expliquer la disparition de quatre travailleurs sociaux, dont l’un d’entre eux a été enlevé l’année dernière en plein jour, en périphérie de la capitale malaisienne, Kuala Lumpur. (…)