Par Didier Lestrade
Un tour sur Grindr, Scruff ou Hornet montre une communauté LGBT très blanche.
La popularité des applications de rencontre gay ne cesse d’évoluer et la compétition est rude. Avec le récent scandale touchant Grindr, qui partageait le statut sérologique de ses utilisateurs, ces applications ne sont plus évaluées seulement selon leur capacité à générer des rencontres mais aussi selon leur code d’éthique. Grindr et Tinder ont été aussi critiqués pour les risques d’être victime d’actes de délinquance encourus par ceux qui les utilisent. Sans oublier l’augmentation locale de certaines IST ou de contaminations par le VIH à cause de la multiplication des relations non-protégées lors des rencontres.
Mais l’angle mort de ces applications, c’est la mixité ethnique. Pour dire les choses crûment, tout le monde ou presque y est blanc. La communauté LGBT est pourtant un lieu où la diversité est supposée être encouragée mais le milieu associatif français manque cruellement de sensibilisation pour refléter le multiculturalisme. Christophe Martet, qui travaille pour le réseau social gay Hornet, estime d’ailleurs que «que la mixité est plus forte sur les applis que dans les associations LGBT». «Elles n’ont pas fait suffisamment d’efforts pour que les personnes racisées s’y retrouvent et aient envie de s’engager, analyse-t-il. Sur Hornet, je croise bien plus souvent que dans le milieu gay des personnes qui sont noires, arabes. Asiatiques un peu moins c’est vrai. Je ne dis pas que ce que nous faisons est optimal. Mais c’est une préoccupation constante y compris dans le choix des soirées que nous sponsorisons. Par exemple, nos articles sont systématiquement illustrés par des photos où figurent des personnes noires, arabes ou asiatiques le plus souvent possible.»
Les phénomènes de rejet des personnes racisées sur les applications de drague sont connus mais ils sont mieux documentés à l’étranger car en France les statistiques ethniques sont toujours interdites. L’année dernière, une étude britannique a révélé que 80% des hommes noirs, 79% des hommes asiatiques, 75% des hommes sud asiatiques, 64% des hommes métissés et 100% des hommes arabes ont subi une forme ou une autre de racisme dans la communauté LGBT. Si les profils comportant des mentions comme «pas de blacks ou d’asiats» se font plus rares sur les applis, elles ont eu un impact définitif. Pour de nombreux gays minoritaires, le racisme dans la communauté est un sujet plus grave que l’homophobie de la société. Et ce problème est encore plus marqué en France où ce racisme dans la drague semble plus flagrant qu’ailleurs car il amplifie leur invisibilité. D’où cette légitime question: est-ce que ces applications amplifient les phénomènes de rejet des non-Blancs?
Sur Scruff ou sur les autres applis plus récentes comme Hornet, la très grande majorité des hommes est blanche. Il y a davantage de Latinos mais relativement peu d’Asiatiques, à moins de chercher des hommes qui vivent à l’autre bout du monde. Et très peu d’hommes maghrébins. (…)