Ce mardi 5 juin, Édouard Philippe avait réuni à Matignon un conseil interministériel consacré à l’intégration des étrangers. Après la controversée loi asile-immigration jugée trop répressive par la gauche et une partie de la majorité, le gouvernement voulait montrer un visage plus humain. Plusieurs mesures ont ainsi été annoncées, notamment le renforcement de l’apprentissage du français, de la formation civique, ou encore l’attribution d’un « pass culture » à chaque jeune étranger disposant d’un titre de séjour.
Mais il n’a pas été question que de rééquilibrage lors de ce huis clos : soucieux de faire des économies, Gérald Darmanin s’est montré favorable à la suppression de l’Aide médicale d’État (AME). Ce dispositif, qui permet aux étrangers en situation irrégulière de bénéficier d’un accès aux soins, est jugé « trop coûteux » par le ministre de l’Action et des Comptes publics. Surtout, il déplore que cette aide permette aux étrangers d’être « mieux traités que les Français bénéficiant de la couverture médicale universelle [CMU] ». Présent lors de la réunion, Gérard Collomb poursse également en ce sens, expliquant que « pour accueillir moins, il faut accueillir mieux ». Pour le ministre de l’Intérieur, l’AME crée un « appel d’air » pour les migrants.
Face à eux, Agnès Buzyn défend l’AME avec ténacité, expliquant que la santé était « un bien universel et commun », et que supprimer cette aide entraînerait « plus de pertes que de gains car l’État ne pourra pas laisser mourir les gens dans la rue et serait obligé de les soigner ». Sensible aux arguments de Gérald Darmanin, Édouard Philippe a dans un premier temps été tenté d’ouvrir une réflexion sur le sujet. Mais il renonce finalement, convaincu par sa ministre des Solidarité et de la Santé.
Autre argument qui a joué en faveur de Buzyn : « Le Premier ministre n’avait pas envie de donner raison à Collomb », explique le collaborateur d’un ministre. Les relations sont en effet extrêmement tendues entre Matignon et Beauvau, notamment depuis que le ministre de l’Intérieur a botté en touche sur la limitation de vitesse à 80 km/h, mesure très controversée prévue par le gouvernement pour juillet, et portée par Édouard Philippe.