Après avoir expliqué pourquoi les pauvres votent à droite, l’essayiste américain Thomas Frank analyse, dans un nouveau livre, pourquoi les riches votent aujourd’hui à gauche.
Son livre bouleversera ceux que désole l’affadissement chaque année aggravé du Parti socialiste, tant la métamorphose de la gauche américaine offre d’analogies avec ce qui est advenu simultanément en France. Au XXIe siècle, donc, les pauvres votent à droite et les riches votent à gauche? Si la perversion se lit dans l’inversion, alors nos démocraties sont perverties. Mais comment en sommes-nous arrivés là ?
Thomas Frank raconte l’échec des démocrates américains, lesquels se proclamaient encore dans les années 1970 «le parti du peuple contre celui de la haute naissance». Un demi-siècle plus tard, ouvriers et classes populaires ont déserté le parti de Franklin Roosevelt et de William Bryan, lequel œuvre désormais à aider toujours plus ceux qui n’en ont pas besoin – inversion, là encore. Même Barack Obama, incarnation d’un Roosevelt revival et d’un nouveau rêve pour le peuple d’Amérique, Obama devant lequel le monde entier a versé la nuit de son élection, le 20 janvier 2009, des larmes de joie et d’incrédulité, le prometteur Obama a échoué. […]
A bien des égards, on croirait lire quarante ans de l’histoire du socialisme français. En France en 2018, ceux qui défendent les idées classiques du socialisme passent souvent pour des «gauchistes», et l’étiquette n’est guère flatteuse. A se demander si, en France comme en Amérique, ce n’est pas un phénomène qu’on croyait réservé au marché immobilier qui abîme le socialisme: la gentrification.